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[COMMENTAIRE D'ARRÊT] CJUE, 4/10/2018, Commission c/ France


Découvrez un exemple de commentaire d'arrêt sur l’arrêt CJUE du 4 octobre 2018, Commission contre France. Découvrez cette copie en droit européen démontrant la soumission du juge national à de multiples contrôles et le caractère obligatoire du renvoi, vu comme une ingérence dans la fonction du juge national. 🔥

 

Sommaire :


 
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N.B.: Cette copie est le fruit de la réflexion d’un étudiant en droit. La découvrir vous permettra de comprendre le raisonnement de ce dernier, qui lui a valu la note indiquée. Elle vous aidera à ce que vous ayez les outils pour formuler votre propre réflexion autour du sujet donné. Pour rappel, le plagiat est formellement interdit et n’est évidemment pas recommandé si vous voulez vous former au droit. En d’autres termes, réfléchissez vous-même ! Enfin, cette copie n’a pas eu 20/20, gardez un œil critique sur ce travail qui n’est donc pas parfait.


Disclaimer : attention ! N’oubliez pas que selon les facultés et les enseignants, l’approche méthodologique peut varier. La méthodologie utilisée dans cette copie n'est donc pas universelle. Respectez la méthodologie enseignée par vos chargés de travaux dirigés et par vos enseignants 😊.


 

Sujet : Commentaire d’arrêt CJUE, 4 octobre 2018, Commission contre France


L’arrêt rendu par la cinquième chambre de la Cour de justice de l’Union européenne le 4 octobre 2018, quant à l’obligation de renvoi préjudiciel qui pèse sur les juridictions nationales dont les décisions ne sont pas susceptibles de recours quand les litiges qu’elles traitent touchent à l’interprétation du droit communautaire, interroge quant à l’instauration d’un nouveau climat dans les relations juridictionnelles au sein de l’Union.


Le Conseil d'État a rendu deux arrêts le 10 décembre 2012, Rhodia et Accor, au sujet du régime d’imposition des dividendes versées entre une société mère et ses filiales. Le régime qui était appliqué en France avait déjà été jugé incompatible avec le droit européen par la Cour de justice de l’Union européenne le 15 septembre 2011, par l’arrêt Accor. Elle avait jugé ce régime discriminatoire si les filiales étaient situées dans un autre Etat membre de l’Union que la France, et donc contraire aux arrêts 49 et 63 du TFUE, au titre de la liberté d’établissement et de la libre circulation des capitaux dans l’espace de libre échange que constitue l’Union européenne.


De plus, une absence de renvoi préjudiciel de la part d’une juridiction nationale de dernier ressort se trouvant face à une question concernant le droit communautaire ou son interprétation constitue un manquement, de la part du Conseil d’Etat, à l’obligation qui découle de l’article 267 alinéa 3 du TFUE. Les sociétés Rhodia et Accor ont déposé plainte devant la Commission, insatisfaites du régime déjà jugé discriminatoire qui leur avait été appliqué.


La Commission a adressé en 2014 une lettre de mise en demeure à la France, lui signalant une possible violation du droit de l’Union via certaines conditions relatives au remboursement du précompte mobilier prévues par les arrêts du Conseil d’Etat. Ces violations ont été contestées par la France, qui a maintenu sa position, et ce même après l’avis motivé la Commission notifié par cette dernière, lui enjoignant de prendre des mesures pour rentrer en conformité avec le droit de l’Union. La Commission a donc saisi la Cour de justice de l’Union d’un recours en manquement sur le fondement de l’article 258 du TFUE.


D’après la Commission, requérante, les articles 49, 63 et 267 du TFUE ont été violés par le Conseil d’Etat, la violation des deux premiers articles constituant une violation d’ordre matériel tandis que la violation du dernier constitue une violation d’ordre procédural.


La Commission considère que le Conseil d’État aurait dû procéder à un renvoi préjudiciel à la Cour de justice de l’Union avant de fixer les modalités de remboursement du précompte mobilier dont la perception avait été jugée incompatible avec les articles 49 et 63 TFUE par l’arrêt rendu le 15 septembre 2011 par la Cour de justice de l’Union, puisqu’il incombe aux juridictions, dont les décisions ne sont pas susceptibles de recours juridictionnel en droit interne, de procéder à un renvoi préjudiciel lorsqu’elles se trouvent confrontées à une question touchant à l’interprétation du droit de l’Union. De plus, la divergence entre la solution définie par la CJUE dans son arrêt du 15 septembre 2011 et la solution proposée par le Conseil d'Etat dans ses arrêts du 10 décembre 2012 écarte la présomption de compatibilité avec le droit de l’Union qu’avance le Conseil d'Etat pour justifier l’absence de renvoi préjudiciel.


La République française, responsable pour le Conseil d'Etat selon la jurisprudence de la CJCE, rendu le 5 mai 1970, Commission/Belgique, affirme que les difficultés rencontrées par le Conseil d'Etat étaient d’ordre factuel et non pas d’interprétation du droit de l’Union et n’impliquaient donc pas un renvoi préjudiciel devant la CJUE. L’absence de précision par la Commission de la nature exacte des difficultés supposément rencontrées par le Conseil d'Etat constitue, selon la République française, un manque de fondement des moyens soulevés par l’institution européenne.


La Cour de justice de l’Union européenne se voit donc saisie d’une question : L’absence de renvoi préjudiciel par une juridiction nationale dont les décisions ne sont pas susceptibles de recours, au sujet d’un litige touchant au droit européen dont la question de l’interprétation avait déjà été traitée par la Cour de justice de l’Union, peut-elle constituer un manquement au droit de l’Union au titre de l’article 267 du TFUE ?


La Cour de justice de l’Union répond par la positive.


Cet arrêt illustre que la soumission du juge national à de multiples contrôles se traduit par un dialogue de sourds (I) mais que le caractère obligatoire de l’ingérence d’institutions européennes dans l’office du juge national est indispensable à la cohérence du droit de l’Union (II).


I- Un juge national sous de multiples contrôles : un dialogue de sourds


En tant que juge de droit commun, le juge doit, dans son interprétation du droit européen, se soumettre au contrôle de l’Union, obligatoirement consultée (A), au risque de voir condamner l’Etat membre, responsable des actions d’une institution constitutionnellement indépendante (B).


A) Un contrôle par l’Union, obligatoirement consultée


L’arrêt rendu le 4 octobre 2018 est le premier à sanctionner le manquement à l’obligation de renvoi préjudiciel qui pèse sur les juridictions nationales de dernier ressort lorsqu’elles se trouvent face à une question qui touche à l’interprétation du droit de l’Union. C’est l’article 267 du TFUE qui confère cette obligation aux juridictions des Etats membres. Cet article instaure une dimension obligatoire au contrôle de la bonne application et de la bonne interprétation du droit de l'Union, et facilite l’exercice par la Cour de justice de l’Union de ses fonctions essentielles.


En effet, la mission fondamentale, et consacrée constitutionnellement, de cette Cour découle de l’article 19§1 premier alinéa du TUE et consiste à assurer « le respect du droit dans l’interprétation et l’application des traités », par un contrôle des juges nationaux, puisqu’ils sont les « juges de droit commun de l’Union européenne » et donc jouent un rôle fondamental dans le système juridique européen.


L’importance du rôle des juges nationaux justifie l’obligation de renvoi préjudiciel et donc leur soumission aux avis de la Commission, au contrôle et aux éventuelles sanctions de la Cour de justice de l’Union à leur encontre. Au vu de l’importance du rôle qui est confié aux juges nationaux, un manquement aux obligations dont ils sont affublés ne saurait rester sans conséquences juridiques. La Cour de justice de l’Union considère que l’absence de renvoi préjudiciel est une réelle violation du droit de l’Union, comme elle l’a affirmé dans l’arrêt Ferreira Da Silva e Brito le 9 septembre 2015.


L’arrêt commenté s’inscrit donc dans la continuité de la ligne jurisprudentielle tracée par l’arrêt Ferreira Da Silva e Brito, en poussant son raisonnement jusqu’à la sanction. Cet arrêt de 2015 précise également que l’obligation de renvoi est tout de même subordonnée à l’existence d’une équivoque quelconque au sujet de l’interprétation d’une norme européenne.


La Cour ne manque pas de le rappeler dans son arrêt du 4 octobre 2018, soit l’arrêt commenté: «Une telle obligation n’incombe pas à cette juridiction lorsque celle-ci constate que la question soulevée n’est pas pertinente ou que la disposition du droit de l’Union en cause a déjà fait l’objet d’une interprétation de la part de la Cour ou que l’application correcte du droit de l’Union s’impose avec une telle évidence qu’elle ne laisse place à aucun doute raisonnable, l’existence d’une telle éventualité devant être évaluée en fonction des caractéristiques propres au droit de l’Union, des difficultés particulières que présente son interprétation et du risque de divergences de jurisprudence à l’intérieur de l’Union ».


Le fait que la Cour de justice de l’Union ait déjà rendu un arrêt traitant de cette même question en 2011, Accor, laisse penser que « l’application correcte du droit de l’Union s’impose avec une telle évidence qu’elle ne laisse place à aucun doute raisonnable », comme le précise l’arrêt lorsque sont exposées les moyens de la Commission.


Cependant, le choix d’une solution inverse à celle proposée par l’arrêt Accor de 2011 montre bien qu’un doute raisonnable existe bel et bien quand à la résolution de cette problématique d’interprétation du droit de l’Union, et démontre la réalité en l’espèce d’un dialogue de sourds entre les juges nationaux, qui refusent de se soumettre à leurs obligations, et la Cour de justice de l’Union, qui est créancière d’une obligation de renvoi préjudiciel pour forcer l’exécution d’un dialogue nécessaire à la cohésion du droit de l’Union.


La contradiction par la juridiction qui se trouve au sommet de l’ordre administratif français constitue à la fois une violation du droit de l’Union, d’une part des articles 49 et 67 du TFUE qui devaient faire l’objet du renvoi préjudiciel et d’autre part de la décision Accord prise par la CJUE en 2011, qui au titre de l’article 288 du TFUE fait partie du droit dérivé de l’Union et est « obligatoire dans tous ses éléments ». L’arrêt rappelle que « un manquement d’un État membre peut être, en principe, constaté au titre de l’article 258 TFUE quel que soit l’organe de cet État dont l’action ou l’inaction est à l’origine du manquement, même s’il s’agit d’une institution constitutionnellement indépendante ».


Cette soustraction par le Conseil d'Etat au contrôle obligatoire que constitue le renvoi préjudiciel entraîne l’engagement de la responsabilité de l’Etat membre, soit la République française.



B) L’Etat membre, responsable des actions d’une institution constitutionnellement indépendante

Si l’Etat membre est tenu pour responsable des violations du droit de l’Union que peuvent perpétrer ses institutions, ce n’est pas pour autant qu’il peut exercer un quelconque contrôle sur les institutions qui sont constitutionnellement indépendantes. C’est le cas des institutions juridictionnelles, dont le Conseil d'Etat fait partie, au titre du principe d’indépendance de la justice et d’une protection juridictionnelle efficace, protégés par l’article 19 du TUE et consacrés à de multiples niveaux: par l’article 6-1 de la Convention européenne des droits de l’Homme, par la décision du Conseil constitutionnel n° 80-119 DC du 22 juillet 1980, et par la CJUE encore récemment le 27 octobre 2021 en condamnant la Pologne à une astreinte d’un million d’euros par jour tant que la chambre disciplinaire instaurée par le gouvernement pour sanctionner les juges qui ne décideraient pas dans le sens qu’il souhaite ne serait pas supprimée.


Le manquement d’une institution nationale, même indépendante, au respect du droit de l’Union engage la responsabilité de l’État membre à laquelle elle peut être rattachée. L’arrêt de la Cour de justice rendu le 5 mai 1970, Commission/Belgique l’illustre. Cet engagement de la responsabilité de l’Etat du fait d’une violation du droit de l’Union par une de ses juridictions constitutionnellement indépendantes s’inscrit dans la lignée de l’arrêt Köber rendu par la CJCE le 30 septembre 2003, dont les stipulations étaient les suivantes : « il découle des exigences inhérentes à la protection des droits des particuliers qui se prévalent du droit communautaire qu’ils doivent avoir la possibilité d’obtenir devant une juridiction nationale réparation du préjudice causé par la violation de ces droits du fait d’une décision d’une juridiction statuant en dernier ressort ».


L’État doit réparer le préjudice qui découle de la mauvaise interprétation ou de la mauvaise application du droit européen. Le droit européen fait partie de l’ordre juridique français et se trouve même à son sommet. Et lorsqu’un préjudice est subi, il doit être réparé par celui qui en est responsable, en l’occurrence la République française, Etat membre de l’Union européenne auquel peut être rattaché le Conseil d’Etat, institution constitutionnellement indépendante.


Par ailleurs, il est possible d’évoquer un non-respect du principe de coopération loyale, consacré à l’article 4-3 du TFUE qui comporte une obligation positive, celle d’exécuter le droit de l'Union et une obligation négative, celle de ne pas contrevenir aux objectifs de l’Union : « les Etats membres facilitent l’accomplissement par l’Union de sa mission et s’abstiennent de toute mesure susceptible de mettre en péril la réalisation des objectifs de l’Union » , l’objectif étant ici la cohésion d’un « nouvel ordre juridique international », mentionné dans l’arrêt rendu par la Cour de justice en 1963, Van Gend en Loos. C’est également à ce titre, de non-respect du principe de coopération loyale, que l’Etat peut être considéré comme responsable du préjudice subi par les sociétés Rhodia et Accor.


Finalement, une invocabilité de réparation est également à soulever pour que les justiciables obtiennent une réparation du préjudice subi du fait de la violation du droit de l’Union. Cette invocabilité de normes européennes est exposée par la CJCE en 1991 dans la jurisprudence Francovich et Bonifaci, qui était d’une grande audace au moment où il a été rendu. Il semble au vu de l’arrêt commenté que la réparation par l’Etat du préjudice subi du fait d’un manquement de la part d’une de ses juridictions au droit de l’Union tend à se démocratiser dans l’ordre juridique européen, et dont la solution en ce sens s’est vue répéter dans l’arrêt rendu par la Cour européenne des droits de l’Homme le 21 mars 2000, Dulaurans c. France.


L’engagement de la responsabilité de l’Etat en cas de violation du droit de l’Union par une de ses juridictions de dernier recours est donc une composante fondamentale dans l’instauration d’un dialogue entre les juges nationaux et les juges de l’Union, pour assurer la cohérence du droit de l’Union et une sécurité juridique homogène et effective sur tout le territoire européen, même si le caractère obligatoire du renvoi peut constituer une ingérence dans la fonction du juge national.


 
 

II- Le caractère obligatoire du renvoi, une ingérence dans la fonction du juge national jugée nécessaire à la cohérence du droit de l’Union


🤝 Si le caractère obligatoire du renvoi peut sembler être lourd de conséquences sur l’office du juge national (B), il répond à un besoin d’assurer la cohérence du droit de l’Union et la sécurité juridique des justiciables (A).


A) La nécessité d’assurer cohérence du droit de l’Union et sécurité juridique


L’ingérence de la Cour de justice de l’Union dans les attributions du juge national, soit dans la résolution de litiges de droit interne, peut sembler nécessaire, justifiée et proportionnelle au regard du qualificatif qui est attribué aux juges nationaux des Etats membres de l’Union : ils sont les juges de droit commun de l’Union. Ainsi, la Cour peut être vue comme une instance encore supérieure aux juridictions nationales, une sorte de Conseil constitutionnel européen, pour lequel les renvois préjudiciels sont l’équivalent des questions préjudicielles de constitutionnalité en France. Une forme de subordination en découle, qui peut être vue comme une atteinte à la souveraineté nationale, du fait du caractère obligatoire du renvoi préjudiciel pour les juridictions dont les décisions ne sont pas susceptibles de recours.


D’un autre point de vue, celui de la Cour, ce caractère obligatoire peut être vu comme un moyen d’assurer la cohésion du droit de l’Union. En effet, la Cour affirme dans l’arrêt commenté qu’elle « a jugé que l’obligation de saisine prévue à cette disposition a notamment pour but de prévenir que s’établisse, dans un État membre quelconque, une jurisprudence nationale ne concordant pas avec les règles du droit de l’Union », s’inscrivant ainsi dans la ligne jurisprudentielle tracée par l’arrêt rendu le 15 mars 2017 par la CJUE. Et le risque que cette obligation vise à éviter s’est bel est bien réalisé lorsque le Conseil d'Etat a omis de la respecter.


Cette ingérence dans les fonctions du juge national parait nécessaire, puisqu’une réelle corrélation apparait dans cet arrêt entre les mesures prises par la CJUE pour faire respecter le droit de l’Union et les violations du droit de l’Union qui surviennent lorsque cette obligation de renvoi préjudiciel n’est pas respectée. La conséquence de cette violation est une divergence au sein de la jurisprudence européenne et national, anormale puisqu’en principe, la jurisprudence nationale est censée aller dans le même sens que la jurisprudence européenne dans la mesure où le droit européen y prime.


Ce contrôle de la bonne interprétation et de la bonne application du droit européen par le biais de renvoi préjudiciel au caractère obligatoire permet d’assurer le maintien de l’Union de droit, dont les Etats sont sujets de droit et donc susceptibles de prodiguer réparation à qui subit un préjudice, dans un ensemble juridique cohérent et égalitaire.


Cet arrêt renforce l’illustration du caractère obligatoire du droit de l’Union, non seulement pour les Etats membres mais aussi pour leurs juridictions. Le Conseil d'Etat est visé par l’article 267 du TFUE en tant que juridiction dont les décisions ne sont pas susceptibles de recours. En ne se conformant pas aux obligations qui découlent pour lui de cette norme européenne de droit primaire, le Conseil d'Etat s’expose et expose la République française à des condamnations et des sanctions de la part de la Cour de justice de l’Union européenne.


Il est important que tout le droit communautaire, y compris les décisions de justice, qui font partie du droit dérivé de l’Union européenne, soient assortie d’un caractère contraignant dont l’effectivité implique des conséquences juridiques, en l’espèce l’engagement de la responsabilité de la République française et l’obligation de réparer le préjudice subi par les sociétés lésées du fait du non-respect de l’article 267 du TFUE par le Conseil d’Etat. Si la décision du Conseil d'Etat est irrévocable puisqu’elle a l’autorité de chose jugée, cela ne l’empêche pas d’être condamnée par la CJUE au nom de la cohésion de l’ordre juridique européen.


Si cette ingérence est fondamentalement nécessaire à la cohésion du droit européen, elle n’en est pas moins lourde de conséquences sur l’office du juge national et notamment sur son pouvoir d’appréciation.


B) Les lourdes conséquences d’une ingérence obligatoire sur l’office du juge national

L’obligation de renvoi préjudiciel qui incombe aux juges nationaux de dernière instance peut être vue comme une ingérence dans l’office de ces juges, et comme une limite à leur pouvoir d’appréciation.


En effet, le juge peut être vu comme mi sous tutelle de la Cour de justice de l’Union et se voit affirmer que l’interprétation du droit européen qui est sienne n’est pas la bonne si elle est assortie de l’ombre d’un doute. Si la certitude de l’interprétation n’est pas absolue, un renvoi préjudiciel est obligatoire : selon l’article 267 du TFUE le juge doit en principe procéder à un renvoi et par exception ne pas procéder à un renvoi. Le manque de précision sur la justification de la nécessité du renvoi était un argument avancé dans l’arrêt par la République française : « la Commission est restée en défaut de préciser les difficultés auxquelles le Conseil d’État aurait été confronté dans les espèces qui ont abouti aux arrêts visés par cette institution et qui auraient justifié un renvoi préjudiciel au titre de l’article 267, troisième alinéa, TFUE ».


Cet argument n’a pas convaincu la Cour de justice de l’Union, cela montre que le principe est le renvoi, et que la preuve de la réunion des conditions pour qu’une juridiction nationale de dernier recours puisse s’exonérer de cette obligation de renvoi préjudiciel sont à la charge du parti de la juridiction nationale. C’est une dynamique inverse de celle qui régit les juridictions nationales dont les décisions sont susceptibles de recours, qui, selon le même article du TFUE, sont quant à elles bénéficiaires d’une simple possibilité de renvoi, pas d’une obligation.


Ce contrôle peut finalement permettre à la CJUE, en plus d’assurer la cohésion du droit européen, la sécurité juridique des citoyens européens par une égale application du droit de l’Union sur tout son territoire, de sanctionner un certain chauvinisme ou entêtement, voire une certaine mauvaise foi de la part d’un juge national de dernière instance, qui serait restée impunie sans l’intervention de la Cour de justice de l’Union.


La volonté délibérée de ne pas formuler de renvoi préjudiciel tout en formulant un jugement contraire à la jurisprudence européenne montre les dérives qui peuvent de manière relativement anecdotique être celles des juges nationaux et causer la zizanie dans l’ensemble juridique cohérent qu’est l’Union européenne, d’où la nécessité de l’obligation de renvoi préjudiciel instaurée par l’article 267 du TFUE, malgré les conséquences lourdes que cette ingérence implique.


 

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