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[COMMENTAIRE D’ARRÊT] Cass. 3e civ., 30/11/2017 (Rupture pourparlers)


Voici un exemple de commentaire d'arrêt en droit des contrats portant sur la rupture abusive des pourparlers, ainsi que sur la réparation du préjudice subi. Cette copie a obtenu la note de 15/20.

 

Sommaire :


 
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N.B.: Cette copie est le fruit de la réflexion d’un étudiant en droit. La découvrir vous permettra de comprendre le raisonnement de ce dernier, qui lui a valu la note indiquée. Elle vous aidera à ce que vous ayez les outils pour formuler votre propre réflexion autour du sujet donné. Pour rappel, le plagiat est formellement interdit et n’est évidemment pas recommandé si vous voulez vous former au droit. En d’autres termes, réfléchissez vous-même ! Enfin, cette copie n’a pas eu 20/20, gardez un œil critique sur ce travail qui n’est donc pas parfait.


Disclaimer : attention ! N’oubliez pas que la méthodologie peut varier selon les facultés, mais aussi en fonction des enseignants. La méthodologie utilisée dans cette copie n'est donc pas universelle. Respectez la méthodologie enseignée par vos chargés de travaux dirigés et par vos enseignants 😊.


Nous avons laissé en orange les commentaires du correcteur.


Commentaire général de l’enseignant : « Les éléments attendus sont évoqués, mais les développements relatifs au droit de la concurrence sont maladroits. »

 

Sujet : Commentez l’arrêt de la 3e chambre civile de la Cour de cassation du 30 novembre 2017


[Accroche] Il est possible par « ?????? (propos illisibles sur la copie) », soit par un accord mutuel entre les contractants, de se retirer des négociations avant la conclusion du contrat. En revanche, comme l’affirme cet arrêt de rejet rendu par la troisième chambre civile de la Cour de cassation le 30 novembre 2017, une rupture abusive des pourparlers fautive est condamnée par des dommages-intérêts négatifs.


[Faits] En l’espèce, une société civile entreprend des négociations afin de construire un bâtiment industriel avec une autre société. Dès le 4 mai 2010, la société civile affirme vouloir conclure un contrat avec l’autre société. Les deux sociétés sont en étroite collaboration active afin de mener à bien les négociations et ce jusqu’au mois d’août. La deuxième société entreprend avec des moyens financiers importants les négociations. Les échanges par écrit entre les deux sociétés afin de procéder aux adaptations laissent présager la prochaine conclusion du contrat. La dernière adaptation date du 22 juillet 2010 et le démarrage des travaux est considéré comme imminent. Cependant, la société civile suspend et arrête brutalement les négociations afin de conclure le même contrat avec une société concurrente.


[Procédure] La société lésée interjette l’appel et assigne le maitre de l’ouvrage de la société civile en responsabilité. La Cour d’appel de Douai rend un arrêt le 16 avril 2014 et condamne la société civile à payer à la société lésée des dommages-intérêts négatifs sur le fondement qu’elle s’est retirée de manière abusive des pourparlers, causant un préjudice à la société lésée et ne respectant pas les lois de concurrence. La société civile se pourvoit en cassation afin de demander la suppression de sa responsabilité et des dommages-intérêts.


[Problématique] Une société en négociation avec une autre société pour la conclusion d’un contrat peut-elle se retirer juste avant la signature dudit contrat afin de conclure avec une autre société concurrente de la première ? « + étendue de la réparation »


À cette question, la Cour de cassation répond par la négative et rejette le pourvoi. En effet, la société civile a laissé croire qu’elle allait conclure le contrat, ce qui a nécessité des moyens financiers importants entrepris par la société lésée. Les dommages-intérêts permettent donc de réparer ce préjudice.


[Annonce de plan] Il sera vu dans un premier temps que cette décision rend acte d’une rupture abusive des pourparlers sur le critère de la bonne foi et de non-concurrence (I). Il sera confirmé dans un deuxième temps que cette solution est justifiée au regard d’une collaboration active entre les deux sociétés (II).


 
 

I/ Une décision rendant acte d’une rupture abusive des pourparlers sur les critères de bonne foi et de non-concurrence


[Chapô] La bonne foi, principe fondamental en droit des contrats, est considérée comme absente lors d’une rupture abusive des pourparlers (A) et faire appel à une société concurrente accentue cette absence de bonne foi (B).


A) La rupture abusive des pourparlers considérée comme contraire au principe de

bonne foi


Avant de conclure un contrat, il est possible d’entreprendre des négociations entre les contractants. En effet, selon l’article 1101 du Code civil de 2016, « un contrat est un accord de volontés entre deux ou plusieurs personnes destiné à créer, modifier, transmettre ou éteindre des obligations. »


En l’espèce, les négociations visent à conclure un contrat de construction entre une société civile qui propose de négocier avec une société du bâtiment. Il y a donc bien deux parties au contrat. L’article 1104 du Code civil pose le principe de la bonne foi dans les négociations et l’exécution du contrat. L’arrêt commenté s’intéresse aux négociations entre les deux parties, dès lors la bonne foi est nécessaire dès ce ?????? (propos illisibles sur la copie).


De surcroit, l’article 1112 du Code civil émet l’obligation de faire preuve de bonne foi au moment des négociations.

 

En l’espèce, les deux sociétés sont en pourparlers depuis le 4 mai 2010. Les négociations doivent être menées de bonne foi, c’est-à-dire, sans tromper l’autre contractant et sans lui faire croire que l’on va contracter alors que non.


Par ailleurs, selon le principe de liberté contractuelle posé à l’article 1102 du Code civil, il est possible de choisir son contractant et donc, a fortiori, de choisir avec qui ne pas contracter. De plus, le contrat est un accord de volontés, car s’il manque une des deux volontés représentant les contractants, le contrat ne peut valablement se conclure au titre de l’article 1128 du Code civil. C’est pourquoi, il est possible de se retirer des négociations si l’un des contractants ne trouve plus l’utilité de contracter. En l’espèce, c’est la société civile qui rompt les pourparlers.


Cependant, tout droit est susceptible d’abus. Cette notion a été posée par l’arrêt Clément-Bayard en 1915. L’arrêt du 30 novembre 2017 montre bien qu’il y a un abus de droit dans la rupture des négociations. La société immobilière fait preuve de mauvaise foi lorsqu’elle fait croire à l’autre société qu’elle va contracter avec elle. L’abus de droit est caractérisé, car la société civile se retire des pourparlers « alors que le marché était sur le point d’être signé et le démarrage des travaux de l’entreprise annoncé comme imminent. »


[Transition] Dès lors, il est possible de constater que la société civile a fait preuve de mauvaise foi et abusé de son droit de rompre les négociations. En outre, cette mauvaise foi est accentuée par la violation de la règle de non-concurrence (B).



B) La violation d’une règle de non-concurrence accentuant la mauvaise foi de la

société civile


En droit des sociétés, il existe une règle prédominante de non-concurrence entre les entreprises. Cependant, la société civile a manqué à cette règle. Elle considérait qu’une autre société du bâtiment, concurrente de la première, était plus en mesure de répondre à sa demande dans la construction du bâtiment industriel souhaité. Le fait qu’elle fasse intervenir cette entreprise concurrente avant la rupture des pourparlers avec la première société est considéré comme déloyal est de mauvaise foi par la Cour d’appel de Douai (« Non »). L’article 1112 obligeant les négociations de bonne foi entre les sociétés a dès lors été violé par la société civile. De plus, la société concurrente n’était pas légitime, car elle ne représente pas un marché plus important comparé à la première société. La société civile a donc fait un usage déloyal de mauvaise foi et illégitime de la concurrence. Dès lors, la société civile est responsable quant au fait d’avoir provoqué une rupture abusive des pourparlers.


L’arrêt de principe Manoukian rendu le 16 novembre 2003 par la Cour de cassation affirme que la rupture des pourparlers est considérée comme abusive lorsqu’elle engendre un préjudice auprès de l’autre société négociatrice. Il faut la présence d’une faute qui trouve son origine dans la mauvaise foi exercée par la société rompant les négociations.


En l’espèce, la mauvaise foi de la société civile immobilière est caractérisée en ce qu’elle fait croire à la société du bâtiment qu’elle va contracter en ne montrant aucun signe de critique à l’adresse de la société lors de leurs échanges par ?????? (propos illisibles sur la copie) et ce jusqu’au dernier moment. Cette mauvaise foi est accentuée par la volonté de la société civile de conclure avec une société concurrente sans ne rien laisser présager à la société du bâtiment lésée. Ainsi, la Cour de cassation confirme l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Douai et considère la société civile responsable d’une rupture abusive des pourparlers envers la société du bâtiment.


[Transition] La condamnation en paiement de dommages-intérêts de la société civile est une solution de surcroit justifiée au regard d’une collaboration active entre les deux sociétés (II).



II/ Une solution justifiée au regard de la collaboration active des deux sociétés


[Chapô] La Cour de cassation, après avoir considéré la responsabilité de la société civile, la condamne à payer des dommages-intérêts à la société lésée (A). Cette solution confirme dès lors la nouvelle rédaction du Code civil, elle est en continuité avec le droit antérieur (B).


A) La stricte application du calcul des dommages-intérêts nécessaires suite à une

rupture abusive des pourparlers


La responsabilité vient du latin « respondere » qui veut dire « avoir à répondre de ». Il s’agit d’avoir à répondre d’un acte qui a causé à autrui un dommage, il faut le réparer. Tel est le principe de l’article 1240 du Code civil [Ndlr : voir le cours sur l'article 1240] qui oblige le fautif à réparer la faute qu’il a causée à autrui, en matière extracontractuelle. La responsabilité reconnue à la société est une responsabilité extracontractuelle, voire précontractuelle, car les sociétés sont encore en négociations et le contrat n’est pas encore conclu. La société civile doit donc réparer un préjudice.


En effet, l’arrêt Manoukian rendu en 2003 est confirmé par l’arrêt rendu par la Cour de cassation le 23 juin 2006. Ils affirment l’obligation de réparer la faute en paiement de dommages-intérêts. Leur quantum, soit leur quantité, doit être calculée en fonction du préjudice causé. Comme le précise l’arrêt commenté, les dommages-intérêts ne peuvent compenser la perte de chance, soit les possibles gains réalisables avec l’exécution du contrat. Il s’agit de dommages-intérêts négatifs, c’est-à-dire remettre la société lésée au statu quo ante, dans la situation dans laquelle elle se trouvait avant d’entreprendre les négociations.


En l’espèce, la rupture des pourparlers a causé un préjudice financier à la société du bâtiment. Cette dernière subit un dommage, car elle s’était particulièrement investie dans le projet immobilier, notamment par une mobilisation du personnel et une mobilisation financière. En se retirant, la société civile commet une faute envers la société du bâtiment qui, légitimement, croyait à la réalisation proche du contrat. Dès lors, la cour d’appel condamne à des dommages-intérêts négatifs la société civile afin de réparer sa faute. La Cour de cassation confirme et ajoute par ailleurs que cette évaluation du montant est correcte au regard des faits et du dommage subi par la société lésée.


[Transition] Ainsi, la Cour de cassation condamne à juste titre la société civile par une application stricte du calcul des  dommages-intérêts. Cet arrêt de rejet confirme en outre le droit antérieur et la nouvelle rédaction du Code civil de 2016.


 
 

B) Un arrêt de rejet confirmant le droit antérieur et la nouvelle rédaction du Code

civil de 2016


Les arrêts Manoukian de 2003 et du 23 juin 2006 sont confirmés par la troisième chambre civile de la Cour de cassation en 2017. L’affaire est jugée au regard de l’ancien droit, soit avant 2016, et du nouveau droit depuis le Code civil nouveau de 2016. Les faits se sont déroulés en 2010 et donc l’application du quantum des dommages-intérêts après une rupture abusive des pourparlers et justifiée. Étant donné que le nouveau code est jurisprudentiel, c’est-à-dire qu’il met sous forme de loi les principes posés par la jurisprudence, son application à l’affaire ne contrevient pas au principe de sécurité juridique. Cela s’accentue par le fait que la cour d’appel et la Cour de cassation ont une même interprétation du droit. La Cour de cassation formée en sa troisième chambre civile pour rendre compte des affaires concernant les entreprises et les sociétés.


Il s’agit dès lors d’un arrêt d’espèce qui s’applique non pas qu’entre particuliers mais aussi dans le monde professionnel de l’entreprise. Cette jurisprudence est applicable aujourd’hui, elle résonne toujours, notamment dans l’affaire récente de vente de sous-marins français à l’Australie. La rupture des négociations par l’Australie est considérée comme abusive. De surcroit, elle fait intervenir l’Angleterre avant la rupture des pourparlers, ce qui est un usage déloyal de la concurrence. L’arrêt commenté montre aussi un usage déloyal de la concurrence, c’est une nouvelle disposition qui accentue la mauvaise foi. Il est possible de rapprocher cela au pacte de préférence soutenu par l’article 1123 du Code civil. En effet, le fait de vouloir conclure avec une autre société alors que les négociations conséquentes est proche de la signature du contrat légitimement cru par la société (« Maladroit ») contractante pourrait, à l’instar du pacte de préférence, être condamnée par l’exécution forcée du contrat.


 
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