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[DISSERTATION] L'office du juge et la loi pénale (Droit pénal général)


Voici un exemple de dissertation en droit pénal général. La dissertation aborde la prééminence de la loi pénale sur l'office du juge ainsi que la liberté du juge face aux conséquences du principe de légalité. Cette copie a obtenu la note de 18/20.

 

Sommaire :


 
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N.B. : cette copie est le fruit de la réflexion d’un étudiant en droit. La découvrir vous permettra de comprendre le raisonnement de ce dernier, qui lui a valu la note indiquée. Elle vous aidera à ce que vous ayez les outils pour formuler votre propre réflexion autour du sujet donné. Pour rappel, le plagiat est formellement interdit et n’est évidemment pas recommandé si vous voulez vous former au droit. En d’autres termes, réfléchissez vous-même ! Enfin, cette copie n’a pas eu 20/20, gardez un œil critique sur ce travail qui n’est donc pas parfait.


Disclaimer : attention ! N’oubliez pas que la méthodologie peut varier selon les facultés, mais aussi en fonction des enseignants. La méthodologie utilisée dans cette copie n'est donc pas universelle. Respectez la méthodologie enseignée par vos chargés de travaux dirigés et par vos enseignants 😊.


Nous avons laissé en orange les commentaires du correcteur.

 

Sujet : L'office du juge et la loi pénale


[Accroche] « Les juges sont les bouches qui prononcent les paroles de la loi » écrivait Montesquieu. En effet, selon la conception héritée de la pensée révolutionnaire, le pouvoir judiciaire en France fut originellement affaibli face au légicentrisme dominant. Ce principe de la loi comme norme suprême résultait de l’aversion des constituants révolutionnaires pour les abus jurisprudentiels des Parlements de province sous l’Ancien Régime. Il fut ainsi consacré dans la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 comme expression de la volonté générale par les représentants de la nation souveraine.


Là est palpable l’influence du contractualisme rousseauiste. La loi est, de cette façon selon le mot de Beccaria, la source exclusive du droit pénal en ce qu’elle détermine les infractions et les peines en découlant et devant respecter dans son aspect matériel la procédure imposée au législateur ainsi que l’exigence de clarté et de précision de sa rédaction. Chose aujourd’hui mise en danger par la tendance de l’emballement législatif qui rend de plus en plus obscure l’intelligibilité de la norme et de ce fait plus difficile l’office du juge dans son rapport à la loi.


Ainsi, conformément à la séparation des pouvoirs [Ndlr : voir une dissertation sur la séparation des pouvoirs et sur le régime présidentiel], le pouvoir normatif du juge s’est vu être fortement limité, voire totalement endigué, dans le but de protéger les droits et libertés des justiciables face à son arbitraire.


Toutefois, en matière pénale, le juge ne peut se limiter à appliquer aveuglément la loi tant elle est la plus contraignante et lui est celui qui doit la rendre applicable et au litige porté et au justiciable devant ce dernier. Son office en tant que magistrat pénaliste vise effectivement à qualifier juridiquement les faits d’infraction ou non, et donc d’en déterminer la peine applicable.


Partant il est pour le juge qui statut en matière pénale une nécessité de procéder à une certaine interprétation de la loi. En effet, si celle-ci est par défaut conditionnée par un contexte, politique selon François Sureau, sociétal selon Me Dupond-Moretti ou historique du législateur afin d’apporter une réponse adéquate a une société donnée pour des mœurs données, il convient, pour autant, d’articuler soigneusement ce principe de sécurité juridique avec le pouvoir discrétionnaire du juge afin de garantir aux justiciables l’équitabilité des décisions rendues. En effet, si le juge est la bouche de la loi et non la plume, il n’est pas pour autant un automate sans foi ni raison qui se bornerait à appliquer machinalement une nome donnée sans opérer un processus de personnalisation de la peine. C’est cependant à ce niveau que peuvent parfois apparaître certains clivages.


En effet, si la loi est aujourd’hui soumise à un contrôle de conformité devant des normes qui lui sont supérieures telles que la Constitution ou le droit communautaire, le juge opère en faisant parfois fi de ces contrôles qui lui sont extérieurs afin de mieux appliquer la loi a un litige, lui permettant ainsi de gagner significativement une certaine indépendance vis-à-vis du texte législatif auquel il est initialement lié. Une indépendance s’opère donc semble-t-il entre l’obligation pour le juge de s’astreindre à dire le droit et sa capacité à faire de la loi une chose sujette à interprétation – toute mesure gardée néanmoins –.


[Problématique] Il va dès lors s’agir de se questionner ainsi : quels rapports entretien le juge avec la loi pénale dans son office ?


[Annonce de plan] Ainsi, les relations entre la loi pénale et l’office du juge se présentent dans un premier temps comme la domination de la première sur le second (I) ; par ailleurs, celles-ci laissent entrevoir également un certain affranchissement du juge face aux conséquences du principe de légalité (II).


 

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I/ La prééminence de la loi pénale sur l’office du juge


[Chapô] Dans un premier temps, nous traiterons tout d’abord de la prééminence de la loi comme moyen de restreindre le pouvoir arbitraire du juge contraint de se conformer à la celle-ci (A) ; puis nous traiterons de l’obligation d’interprétation stricte du texte législatif pour le juge (B).


A) La restriction du pouvoir arbitraire du juge


Historiquement, la France a, pour les raisons qui renvoient à la philosophie révolutionnaire, opté pour un système de séparation des pouvoirs par lequel le pouvoir judiciaire est grandement entravé et affaibli par rapport aux deux autres. Pour certains auteurs, le domaine législatif n’est d’ailleurs pas un pouvoir en soi mais simplement l’émanation des deux autres grands pouvoirs tant ce dernier est subordonné aux deux premiers.


En effet, en principe, le juge français est dans l’incapacité de créer de la norme, la jurisprudence ne peut être considérée comme une source du droit pénal. Seule la loi est l’expression de la volonté générale et à est à même de fixer les infractions et les peines. Ainsi, il est absolument impossible pour le juge de prononcer une peine à l’égard d’un fait qui ne serait pas prévu par les textes, c’est ce que dispose l’article 5.


Le juge n’a donc aucun pouvoir d’immixtion dans la vie des justiciables si le fait qu’il souhaite poursuivre n’a pas été déclaré, au préalable, comme prohibé par la loi. Son pouvoir arbitraire est donc ainsi totalement éludé. Pour autant, une certaine limite est constatable dans la restriction du juge par la loi dans la mesure où le juge a l’obligation d’individualiser la peine, c’est-à-dire de la rendre la plus juste et la plis applicable au litige.


Effectivement, le juge peut augmenter ou diminuer le quantum des peines encourues en ajoutant par exemple des peines complémentaires. À titre d’illustration, une loi de 2019 modifiant l’article 132-19 du Code pénal vient interdire au juge de prononcer une peine d’emprisonnement inférieure ou égale à un mois dans le champ des infractions correctionnelles.


[Transition] Cette marge de manœuvre jurisprudentielle est donc strictement encadrée par la loi et ne peut faire l’objet d’une qualification d’indépendance totale du juge. En cela, le juge est précisément dans l’obligation d’interpréter strictement le texte législatif.



B) La loi pénale comme absolu stricte dans son interprétation par le juge


Kant défini l’absolu stricte comme étant une chose extérieure à l’individu et s’imposant à tous sans que chacun n’y puisse changer quoi que ce soit. Kant estime en revanche que seule la raison peut influer sur cet absolu tant c’est la conscience qui donne une perception de la chose, l’absolu est donc appréciable en fonction de sa finalité. L’absolu stricte est alors modelable par un raisonnement téléologique tant c’est cette dernière appréciation qui permet de sonder et de faire sien l’absolu stricte. Ici, le juge français est dans une position quelque peu délicate ; son office est en équilibre entre les articles 4 et 5 du Code civil lui interdisant d’une part, le déni de justice, et d’autre part, d’user d’un pouvoir normatif. De ce fait, le vide juridique n’existant théoriquement pas en droit français, car comblé par la théorie de la fiction juridique, le juge doit se positionner sur un juste milieu afin d’interpréter la loi de manière stricte.


En d’autres termes, il lui est interdit d'étendre de manière analogique le domaine de l’application de la loi au-delà des limites fixées par le législateur. Le juge ne peut donc pas compléter à sa guise la liste des peines établie par la loi. Cette obligation figure à l’article 111-4 du Code pénal : « La loi pénale est d’interprétation stricte » et a pu notamment être reprise par la Cour de cassation quand elle statue en rappelant dans ses motifs l’interdiction pour le juge « de procéder à une interprétation analogique de la loi ». En cela, la loi s’incarne en absolu stricte kantien, c’est-à-dire une chose qu’il s’agit d’accepter sans pour autant pouvoir y changer quoi que ce soit.


Pour autant que le juge soi limité par le sens d’un texte, selon les éléments de contexte, le juge est également en mesure de procéder à une interprétation téléologique, c’est-à-dire en prenant en compte à finalité visée, du texte législatif. La norme pénale obscure s’inscrit pour laejuge dans la dynamique de l’absolu kantien ; c’est-à-dire qu’il va faire prévaloir l’esprit du législateur sur la lettre afin d’être le plus fidèle au texte. Ce raisonnement téléologique est la recherche de la ratio legis, donc totalement admise.


[Transition] Bien que le légicentrisme fut initialement cardinal en droit français, il résulte aujourd’hui des contraintes actuelles que la loi n’est plus en mesure d’être prédominante face à l’apparition d’autres sources concurrentes du droit pénal. La loi a en effet progressivement perdu de sa valeur quasi-sacrée selon le mot de Rousseau et son effacement s’est fait au profit d’un renforcement de l’office du juge.

Bon à savoir : pour que tu progresses et que tu comprennes tes erreurs, nous avons mis en place un service de correction de copies avec notre équipe d'enseignants. L'objectif n'est pas simplement de te donner une note : nous voulons relever tes erreurs, te les expliquer et t'aider à comprendre quels sont les points de méthodolgie que tu dois revoir !

II/ Une certaine liberté du juge en expension


[Chapô] Dans un secondement, il sera traité des limites de la loi pénale qui découlent de son déclin et moderne et philosophique permettant une plus grande marge d’appréciation au juge (A) ; avant de voir que le juge élude ces problèmes grâce à sa liberté de contrôle de la loi (B).


A) Les défaillances de la loi pénale


Fréquemment, des intellectuels s’élèvent contre les lois votées tant elles sont parfois contraires au principe de légalité. C’est ainsi que François Sureau publie trois plaidoiries prononcées devant le Conseil constitutionnel à l’occasion de trois QPC, un ouvrage dénommé Pour la liberté. Ainsi, ce dernier met en lumière dans ses trois plaidoiries : les imprécisions et obscurités de rédaction, ainsi que la vive volonté de substituer la liberté à la sécurité, au droit l’état policier. En effet, la qualité d’écriture du législateur a nettement diminué si bien que cela cause nombre d’insécurités juridiques ainsi se prononce la Cour de cassation le 29 février 2012 lorsqu’elle s’en remet au Conseil constitutionnel sur la définition du harcèlement sexuel largement sujet à controverse tant la clarté de ce texte selon le mot Badinter « est aussi clair qu’un vase de {fange} ».


Une explication de la chose peut tenir notamment à des facteurs de progrès technique et d’évolution des consciences avec lesquels le législateur peut être en décalage, une certaine tradition linguistique est encore prégnante dans le domaine du droit, chose qui tend à rendre parfois obscure le texte et absconse sa rédaction. Le recours qu’est la Question Prioritaire de Constitutionnalité constitue donc une réelle solution comme il sera davantage développé ci-dessous.


Il est pertinent de mentionner que d’une part, de manière favorable au juge, la méthode de l’interprétation par analogie usitée par ce dernier est tolérée lorsqu’elle est favorable à la personne poursuivie ; d’autre part, au détriment de la loi, ce raisonnement perd davantage de son efficience suite à la diminution de son champ d’application en ce que les contraventions relèvent désormais du domaine réglementaire. Cette « humiliation faite à la loi » selon le mot de Paul Durand, démontre une fois encore le déclin qu’a connu la loi ces dernières décennies. 



B) Le juge : contrôleur de la loi


Ce déclin de la loi a donc pu causer certains problèmes auxquels une entité en particulier a pu apporter des solutions : le juge. Néanmoins, ce dernier en sort plus fort. En cela, depuis la résurgence de la Constitution comme norme suprême durant la Ve République, notamment depuis la révision constitutionnelle de 2008 avec l’apparition de la QPC, ainsi que l’apparition des normes internationales telles que le droit communautaire et le droit issu de la Convention de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales ; le statut révolutionnaire de la loi comme absolu semble pour cette dernière n’être plus qu’un vague songe. Elle n’est plus cette norme prédominante mais doit se conformer à de nouvelles normes qui lui sont « supérieures ». Cette conformité est notamment vérifiée par le biais d’un contrôle opéré par le juge lui-même.


Premièrement, l’arrêt précité du 29 février 2012 de la Cour de cassation est en réalité l’illustration parfaite de la capacité du juge judiciaire à affirmer ses compétences de fonction de juge constitutionnel. En effet, grâce à son rôle dans les filtrages des requêtes de Questions Prioritaires de Constitutionnalité, le juge contourne ainsi la théorie de la loi écran [Ndlr : voir une dissertation sur la loi-écran] et s’octroie le droit d’apposer son avis sur le contrôle et la conformité de la loi à une norme supérieure, ici la Constitution.


Deuxièmement, les juges de cassation démontrent leur capacité à mettre en jeu la loi interne face à des normes internationales, ici le droit de l’Union Européenne, et à reconnaître la supériorité de ces dernières après un contrôle de conventionnalité de la loi pénale. Décision doctrinalement sujette à caution tant cette tendance de dépassement des normes extérieures plait et déplait – mais là est un sujet plus politique que juridique –.


En somme, si le légicentrisme originel en droit français n’est plus d’actualité, la protection des justiciables face à l’arbitraire du juge n’est pas nécessairement mise en péril. En effet, le droit est fluctuant et évolue en fonction du progrès technique et des besoins de la société.


L’avenir tend vers l’extension de l’office du juge, notamment par le contrôle de conventionnalité, mais cela en articulant toujours judicieusement le principe de légalité et le respect des libertés individuelles. Le « gouvernement des juges » du Professeur Édouard Lambert n’est donc pas à craindre. Nonobstant l’éviction du gouvernement des juges, « le peuple juge » de Rosanvallon tend à se confirmer. Il semble que le peuple se sent plus concerné par les normes leur dictant comment vivre aujourd’hui qu’auparavant et que l’opacité de la loi ainsi que le rôle du juge dans la schème pénal est une préoccupation certaine.


En conclusion, il est notable que l’office du juge est double. D’une part, dire le droit que les législateur ont voté dans l’optique de donner une réponse institutionnelle à une infraction pouvant ébranler cette institution. D’autre part, l’office du juge est de prendre la norme de manière stricte et d’œuvrer à ce que son application soit la meilleure. C’est-à-dire ne pas punir pour punir mais punir pour faire comprendre, plus encore c’est rendre accessible la loi pénale peut être perçue comme hors sol aux justiciables ; c’est alors le pouvoir de personnalisation de la peine. Pour autant si le juge pénal dispose d’une certaine latitude dans son office, force est de constater que ce pouvoir discrétionnaire s’inscrit dans un cadre formel qu’il ne lui faut dépasser.


Steven DAVIET


 
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