Qualification juridique : définition, explications, exemples
- Pamplemousse Magazine
- 5 août
- 17 min de lecture
Dernière mise à jour : il y a 6 jours
En droit, pour réussir vos fiches d'arrêt, vos commentaires d'arrêt et vos cas pratiques, il est essentiel que vous sachiez qualifier juridiquement vos faits (pour attribuer les bons régimes juridiques). La qualification juridique est une opération de raisonnement qui vous impose de déterminer la nature d’un élément pour le classer dans les cadres juridiques correspondant conformément au Droit.
Sommaire :
C’est quoi la qualification juridique ?
📚 La qualification juridique peut se définir comme la traduction en droit de faits concrets. Il s’agit d’une étape du raisonnement juridique du juriste qui permet de « colorer » en droit des faits en français.
Qualification juridique : définition
La qualification juridique est une opération de raisonnement qui impose à l’étudiant en droit (et au juriste) de déterminer la nature d’un élément pour le classer dans les cadres juridiques correspondant conformément au Droit.
Comme tout bon juriste, il est élémentaire de proposer une définition des termes du sujet. Dans « qualification juridique », il y a qualification et juridique. Zoomons un peu pour mieux comprendre !
Qualification
La qualification est une opération intellectuelle par laquelle on va déterminer dans quelle « case » on peut placer un élément.
Si l’on se fie à Larousse, qualification se définit comme « attribution d’un titre, d’une qualité » (cette définition n’est pas très satisfaisante…). Si l’on poursuit la lecture, on découvre chez le même éditeur, « 4. Détermination de la nature juridique d’un acte, d’un rapport de droit, afin de résoudre un conflit de lois ; détermination de la nature du fait incriminé et du texte qui le sanctionne. 5. Classement des faits d’un procès civil dans les cadres juridiques qui leur correspondent. ». Ah, là, il y a des éléments qui nous intéressent !
détermination ;
nature juridique ;
classement ;
cadres juridiques qui leur correspondent.
Si l’on fait une phrase à partir de ces éléments, l’on pourrait dire que la qualification correspond à la détermination de la nature juridique d’un élément pour opérer un classement dans les cadres juridiques qui leur correspondent.
Chez Robert, on n’a pas trop été emballé par les définitions proposées « action ou manière de qualifier ». C’est l’occasion de vous rappeler que raisonner juridiquement, c’est aussi croiser les sources et fonder ses propos, toujours, quel que soit l’exercice juridique !
Juridique
Le terme juridique renvoie au Droit. Larousse et Robert définissent ce terme comme « ce qui relève du Droit/a rapport au Droit ». On n’aurait pas mieux dit et on vous renvoie à cet article relatif au Droit objectif et aux droits subjectifs.
Donc, la qualification juridique renvoie à l’opération de raisonnement qui impose à l’étudiant en droit (et au juriste) de déterminer la nature d’un élément pour le classer dans les cadres juridiques correspondant conformément au Droit.
💡 Vous devriez désormais mieux comprendre l’intérêt des études de Droit et de la quantité astronomique de connaissances que vous devez intégrer : elles vous servent à réfléchir en droit et ainsi à pouvoir déterminer les situations qui vous sont soumises dans ce cadre.
Qu’est-ce que « la qualification des faits » ?
La qualification des faits correspond à l’opération intellectuelle que l’étudiant doit réaliser lorsqu’un énoncé ou un texte juridique lui est soumis. Distinguons entre la qualification en cas pratique et celle en fiche de décision (aussi appelée « fiche d’arrêt »).
La qualification juridique et cas pratique
Dans un cas pratique, des faits vous sont soumis et la première étape à réaliser pour avoir un raisonnement cohérent est de les qualifier.
⚠️ Attention : les enseignants ne l’exigent pas toujours. Néanmoins, cela va dans votre sens de le faire ou au moins de savoir le faire, car vous donnez une dimension juridique à votre cas et aurez plus de facilité à dégager le problème. |
Prenons un exemple pour illustrer.
Exemple : Adrien a acheté une montre à 2 000 euros, la pensant authentique, avant de découvrir qu’il s’agit d’une copie contrefaite. |
Dans ce cas, il y a plusieurs façons de qualifier les faits, selon le problème que vous allez dégager, qui lui-même va dépendre de la matière dans le cadre de laquelle vous étudiez la situation. Il est très important de le comprendre dès maintenant, car la qualification dépend du domaine dans lequel vous l’inscrivez.
Si l’on part du principe que l’énoncé est donné à des L2 droit des obligations, la qualification sera la suivante :
|
Si le cas est donné dans le cadre du droit de la consommation, Adrien devient un consommateur (du moins, on peut le supposer. Cependant, en réalité, nous n’avons pas suffisamment d’éléments dans ce cas pour considérer que la personne physique qu’est Adrien a agi à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité professionnelle [art. liminaire du Code de la consommation]. Néanmoins, on peut le déduire, il va être difficile de justifier l’achat d’une montre à ce prix, dans le cadre d’une activité professionnelle…).
En droit de la propriété intellectuelle, la situation pourrait être qualifiée de contrefaçon. Tandis qu’en droit commercial, peut-être qu’il aurait été possible d’évoquer de la concurrence déloyale, bien que dans ce cas, le problème ne se situe pas sur ce terrain et nous n’avons pas assez d’éléments.
Ce que nous voulions surtout vous montrer, c’est combien la qualification juridique est une opération complexe qui va dépendre de ce que vous étudiez et de ce que vous devez restituer.
📚 Il est donc important d’en saisir l’importance dès le début de vos études pour acquérir de bons réflexes de raisonnement. Savoir qualifier, c’est savoir parler juridique (c’est comme parler une autre langue, mais en français).
La qualification juridique pour les fiches de décision (» fiches d’arrêt »)
Dans une fiche d’arrêt (ou de décision), l’opération de qualification juridique s’impose (même si, encore une fois, tous les enseignants ne l’exigent pas) afin d’apporter une présentation claire de l’affaire étudiée.
Il n’y a rien de plus difficile à suivre qu’une ribambelle de messieurs qui se suivent et s’attaquent pour obtenir l’indemnisation de leur action en responsabilité contre la moitié de l’alphabet. Si c’est difficile pour vous lorsque vous lisez la décision, imaginez que ce n’est pas plus simple pour le correcteur qui tente, en plus, de vous relire…
Alors, il vaut mieux qualifier légalement tous ces personnages sympathiques pour gagner en clarté. Illustrons avec un exemple :
Cass. com., 6 mars 1990, n° 88-12477, Bull. civ. IV, n° 74 (…) Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. X… a, pour les besoins de son commerce, commandé du matériel à la société Hugin Sweda ; que cette dernière avait précisé, dans les conditions générales de vente figurant dans ses bons de commande, que ses offres ne devenaient définitives et ne constituaient un engagement qu’après ratification de sa part, et que toute commande ne serait considérée comme ferme qu’après acceptation par elle ; que M. X…, avant l’acceptation de sa commande par la société Hugin Sweda, s’est ravisé et l’a rétractée ; (…) Dans cette situation les M. X (et pire « Mr X ») sont à proscrire, ils doivent disparaître. Voici un exemple pour qualifier : Un commerçant (ou un acheteur, mais au visa de la décision, on sait qu’il a la qualité juridique de commerçant) a passé commande de matériel à une société venderesse. La venderesse avait précisé, dans les CGV figurant dans les bons de commande, que ses offres n’étaient définitives qu’après ratification de sa part, et qu’une commande ne serait considérée comme ferme qu’après acceptation de sa part. Or, le commerçant (ou l’acheteur) s’est rétracté avant d’avoir obtenu l’acceptation de la venderesse. |
Pourquoi qualifier les faits ?
📝 Qualifier les faits est important, car cela vous permet de traduire juridiquement, réfléchir juridiquement et gagner en rigueur, ce qui vous assure de réussir vos exercices juridiques. Autrement dit, qualifier juridiquement est utile pour bien appliquer la méthodologie juridique (et accessoirement, réussir ses études de Droit).
Traduire juridiquement
Traduire juridiquement est l’un des premiers objectifs de la qualification des faits qui aboutit à mieux réussir vos exercices juridiques.
En effet, en droit, chaque mot a un sens, et le correcteur parle déjà « Droit », donc, à vous de bien traduire vos idées en employant les bons termes. Le droit, c’est un nouveau langage ! Il faut savoir traduire juridiquement du français.
Par exemple : Mireille a acheté des pommes de terre, mais elle souhaite se faire rembourser, car elle a fini par acheter sous la contrainte. Mireille → acheteuse/acceptante (art. 1113 et 1118 du Code civil). A acheté des pommes de terre → contrat (art. 1101 du Code civil et même 1582 du Code civil pour le contrat de vente qui est un contrat spécial). Acheté sous la contrainte → violence (art. 1140 du Code civil). Se faire rembourser → demander la nullité du contrat pour vices du consentement (art. 1128, 1130 et 1131 du Code civil). Remarquez que notre traduction juridique ne se limite pas à des mots, elle s’accompagne aussi de fondements juridiques Les pommes de terre aussi peuvent être qualifiées juridiquement → ce sont des meubles et des choses fongibles. Cette qualification aurait notamment eu un intérêt si l’on traitait le cas sous l’angle du droit des contrats spéciaux. Souvenez-vous que chaque matière a un vocabulaire spécifique qu’il convient de savoir exploiter pour traduire juridiquement (et donc réfléchir juridiquement). |
C’est un exercice d’équilibriste, une recette de cuisine. Il s’agit de bien doser les ingrédients pour parvenir au résultat que vous voulez, ces ingrédients sont des mots. À vous de savoir quels effets ils ont : qui est le sel, qui est le sucre, qui est la farine, qui est le beurre. Mais, gare à vous, car mettre une quantité de sel aussi importante que l’on met du sucre en pâtisserie va complètement dénaturer votre pâte à crêpes… Imaginez + de 50 g de sel, dans une pâte à crêpes…
Tout est question d’équilibre (et d’utiliser les bons ingrédients pour la bonne raison) et pour bien exploiter le vocabulaire, il faut d’abord comprendre à quoi il sert (d’où l’intérêt de suivre des cours de droit à l’université dispensés par des enseignants qui donnent de leur temps pour la recherche qui fait évoluer le droit…).
En traduisant juridiquement des faits « français », vous n’oublierez rien, car vous aurez déjà repéré les régimes* juridiques applicables. Si vous n’oubliez rien, vous maximisez vos chances d’approcher le 20/20.
*Les régimes juridiques renvoient à un ensemble de règles qui s’appliquent à raison d’une situation juridique/qualité juridique.
Réfléchir juridiquement
C’est en exploitant les bonnes qualifications juridiques que vous pouvez réfléchir correctement (et comme un juriste).
C’est à cela que servent les études de Droit : vous donnez suffisamment de matière pour réfléchir à un problème. La qualification est la base du raisonnement juridique, si vous ne traduisez pas juridiquement, vous ne réfléchissez pas juridiquement et l’ensemble de votre exercice juridique risque de se limiter à un récital d’ensemble de règles que vous n’avez pas comprises (sinon, vous auriez l’automatisme de qualifier).
Gagner en rigueur
Qualifier juridiquement permet de gagner en rigueur en s’efforçant d’employer les termes les plus précis pour les situations. Il s’agit d’employer les termes « idoines » c’est-à-dire, les plus appropriés dans le contexte juridique pour traduire une réflexion juridique.
En somme, qualifier juridiquement permet de traduire rigoureusement une réflexion juridique !
Comment on qualifie juridiquement ?
✍🏻 L’art (abstrait, hélas, parfois), de qualifier juridiquement dépend de ce que vous avez à qualifier : une situation, un acte juridique, un bien, une personne ou un problème.
Comment qualifier juridiquement une situation en droit ?
Pour qualifier juridiquement une situation en droit, la base élémentaire est d’avoir suffisamment de connaissances pour réfléchir grâce au vocabulaire (notamment juridique), mais aussi un peu de logique…
Acquérir le vocabulaire juridique
En effet, pour qualifier juridiquement une situation, il faut du vocabulaire juridique. Pas de recette miracle, pas de solution magique : il faut apprendre votre cours et vous créer un lexique de termes juridiques dès lors qu’un mot ou qu’une expression sont flous. Sinon, vous n’aurez jamais assez de vocabulaire pour réaliser cette opération intellectuelle importante.
C’est la somme de ces petits efforts qui vous fera passer de (bon) étudiant à excellent étudiant. Ne faites plus les choses à moitié et commencez par créer des fondations solides à votre maison.
Vous le savez, seule la maison en briques survit. À quoi bon bâtir avec de la paille ou du bois, vous connaissez l’issue de l’histoire. Et si vous n’avez pas la référence, il convient de revoir les classiques de l’enfance !
Inscrire la situation dans la logique du cours
Pour qualifier juridiquement il faut un peu de logique a-t-on dit ? En effet, savoir inscrire votre situation dans le contexte de votre cours vous aidera à exploiter les termes idoines.
Si vous êtes en L1 droit de la famille et qu’un cas pratique traite d’une tromperie dans le cadre d’un mariage sur le fond d’une escroquerie, IL EST ÉVIDENT qu’on n’attend PAS de vous que vous qualifiiez pénalement les faits et l’infraction ; mais que vous vous intéressiez au divorce et à ses causes.
Par exemple, Mireille souhaite vivre la folle aventure avec son amant, Karl. Elle en a marre de sa relation monotone avec Michael qu’elle a rencontré alors qu’ils étaient au lycée. Elle veut se séparer de Michael, mais hésite, car après tout, c’est lui qui a l’argent, et elle a signé un contrat de mariage pour consentir à une séparation de biens. Misère, si elle divorce, elle n’aura droit à rien. Elle décide alors de montrer une escroquerie avec Karl pour soutirer des fonds à Michael. Ce dernier découvre non seulement la supercherie, mais en plus la tromperie, et il ne compte pas en rester là, hors de question qu’elle s’en sorte indemne. Il vous demande conseil pour rompre ce mariage. En droit, cela donne « une épouse rompt son devoir de fidélité à l’égard de son époux. Ce dernier, découvrant non seulement qu’elle a une relation extraconjugale, mais qu’en plus, elle a tenté de l’escroquer, souhaite mettre fin à la relation de mariage. Un divorce pour faute est-il envisageable ? L’époux pourra-t-il prétendre à l’octroi de dommages et intérêts ? » Voici une manière de qualifier juridiquement la situation et d’en faire découler naturellement les problèmes de droit. Nous sommes toujours en L1 droit de la famille, il n’y a pas lieu d’invoquer, dans les problèmes de droit, l’escroquerie, qui n’est pas de notre niveau. Il est « hors de question qu’elle s’en sorte indemne » nous laisse comprendre, nous, apprentis juristes, qu’il veut obtenir une réparation financière, ce que l’on traduit par dommages et intérêts. Il souhaite rompre ce mariage, ce qui nous laisse entendre qu’il veut divorcer. Difficile de penser à l’annulation qui sous-entend un problème dans la formation du mariage. Or, rien de tel n’est mentionné ici. On le répète, la traduction impose de la réflexion. |
Même une situation qui semble déjà juridique peut être précisée à l’aide d’un vocabulaire de Droit encore plus approprié.
Par exemple : Monsieur Emmanuel MACRON a prononcé la dissolution de l’Assemblée nationale le 9 juin 2024. Le président de la République a prononcé la dissolution de la chambre basse du Parlement (ou de l’Assemblée nationale) le 9 juin 2024 en vertu de ses pouvoirs propres, sur le fondement de l’article 12 de la Constitution. |
Comment qualifier un acte juridique ?
Pour qualifier un acte juridique, sans reprendre les éléments énoncés ci-dessus, il s’agit de savoir catégoriser les types d’actes, avant de passer à l’action. Autrement dit, si vous ne savez même pas les définir, vous aurez du mal à qualifier.
ACTE JURIDIQUE
manifestation de volonté destinée à créer des effets de droit (art. 1100-1 du Code civil).
Acte juridique unilatéral sous-entend une seule manifestation de volonté pour être formé → par exemple, un testament. | Acte juridique synallagmatique* (ou conventionnel) sous-entend des manifestations de volonté réciproques pour être formé → par exemple, un contrat (v. art. 1101 du Code civil). *À NE PAS CONFONDRE avec le contrat synallagmatique qui est un type d’acte juridique synallagmatique. Le contrat peut-être unilatéral, c’est donc un acte juridique synallagmatique, mais unilatéral pour ce qui est des obligations. Pour ce qui est des contrats vous trouverez les différentes catégories aux articles 1105 s. du Code civil (unilatéral/ synallagmatique ; consensuel/réel/solennel ; onéreux/gratuit ; de gré à gré/d’adhésion ; commutatif/aléatoire, etc.). Et comme le droit ne se limite pas à des catégories générales, vous trouverez différents types de contrats spéciaux (contrat de société, contrat de vente, contrat de dépôt, contrat de travail, etc. > chacun conduit à un régime spécifique. Il faut donc reconnaître les situations, pour qualifier les actes et appliquer les régimes juridiques idoines. Notez que le juge n’est pas tenu par la qualification donnée par les parties (art. 12 du Code de procédure civile). Si lui n’est pas tenu, vous n’êtes pas davantage encadré par ce que l’énoncé vous indique, si vous estimez que l’acte relève d’une autre catégorie juridique. On vous apprend à réfléchir, on peut donc tester vos réflexes en vous tendant des petits pièges. V. en ce sens Cass. soc., 30 mai 2007, n° 06-41.240. |
Souvenez-vous que la seule qualification d’un acte juridique n’a aucun intérêt : si vous qualifiez, c'est pour appliquer une série de règles spécifiques (le régime juridique !).
Par exemple, Julien décide de faire appel à un prestataire pour réaliser des missions pour le compte de son entreprise, il lui crée même une adresse mail rattachée à son entreprise. Julia décroche le contrat. Julien lui impose des horaires de travail et autres directives quant à la manière de faire son travail dans le cadre de ce contrat d’entreprise qu’ils ont conclu le 18 novembre 2020. Au terme de bientôt 4 ans de travail, Julia se fait saluer par Julien qui met fin à la prestation, soudainement. Julia entend obtenir le paiement de toutes les heures qui ne lui ont pas été réglées, car « t’es entrepreneur, c’est aussi ça, faire des heures en plus pour assurer la meilleure prestation possible et la satisfaction du client, lui dit Julien ». Qu’en pensez-vous ? |
Une prestataire de service réalise des missions sous la subordination du maître d’œuvre. Cette dernière réalise qu’un certain nombre d’heures n’a pas été rémunéré, étant « hors contrat » d’après le maître d’œuvre.
Il convient de relever que la prestataire est subordonnée à l’employeur qui lui dicte la manière de réaliser son travail et lui impose des heures, avec une adresse mail rattachée à son entreprise. Le lien de subordination ici laisse l’opportunité de requalifier le contrat d’entreprise en contrat de travail, car la « prestataire » réalise une prestation contre rémunération de manière subordonnée.
Non seulement elle pourra tenter de récupérer son dû, mais en plus elle pourra introduire une action pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Exercez-vous :
Comment appelle-t-on un legs ? Le legs est consenti par un acte juridique unilatéral qu’est le testament ;
Comment qualifier l’achat d’une montre hors de prix ? L’achat d’une montre est un contrat de vente qui est un contrat synallagmatique, consensuel, à titre onéreux, probablement de gré à gré, et commutatif ;
Qu’est-ce qu’une heure de cours particulier en Droit ? Il s’agit d’un contrat de prestation de service qui est un contrat synallagmatique, consensuel, à titre onéreux, probablement d’adhésion, et commutatif ;
Julien donne à Julia sa voiture : il s’agit d’un contrat de donation qui est un contrat unilatéral, solennel, à titre gratuit, de gré à gré, et commutatif ;
Mireille et Karl créent une société : il s’agit d’un contrat de société qui est un contrat synallagmatique, consensuel, à titre gratuit, de gré à gré, et aléatoire (bien que tout le monde ne soit pas unanime) ;
Mireille est agacée par Karl et crée sa société seule : il s’agit d’un « contrat » de société qui est établi sous la forme d’un acte unilatéral, consensuel, à titre onéreux, de gré à gré, et aléatoire (bien que tout le monde ne soit pas unanime).
Comment qualifier juridiquement un bien ?
Comme pour les actes juridiques, la qualification juridique des biens dépend des catégories que vous avez apprises en la matière. Il s’agit encore une fois de connecter vos neurones en réfléchissant pour réaliser les liens entre le français et le droit.
La qualification des biens en elle-même n’a pas d’intérêt sans le reste des régimes applicables en droit des biens. Il convient donc que vous maîtrisez la matière pour savoir à quoi renvoient les qualifications les plus appropriées, pour les exploiter convenablement.
Si vous ne maîtrisez pas bien ce sujet, on vous renvoie à notre cours gratuit en droit des biens ! Et en complément, exercez-vous :
Le chien du voisin nuit à mon sommeil → Le bien meuble (ici la qualification juridique n’a aucun intérêt) génère un trouble anormal de voisinage ;
Le chien dû se fait battre → L’être vivant doué de sensibilité subit des sévices ;
J’ai acheté des pommes → J’ai conclu un contrat de vente portant sur des biens fongibles qui ont été individualisés ;
Je vends mon terrain → je vends un immeuble ;
Je vends mon appartement → Je vends un immeuble ;
J’aimerais vendre mon radiateur qui est scellé au mur → J’aimerais vendre un immeuble par destination ;
Je vends mes récoltes de blé → Je vends un meuble par anticipation ;
Je vends mon Code de la justice administrative → Je vends un meuble.
Comment qualifier une personne juridique ?
Pour qualifier une personne, ce n’est, en principe, pas très difficile : personne physique ou personne morale. Mais, en réalité, la qualification va dépendre d’éléments temporels :
Le fœtus est-il né vivant et viable ? Oui, c’est une personne physique. Non, ce n’est pas une personne physique ;
La société est-elle immatriculée/l’association est-elle déclarée en préfecture ? Oui, c’est une personne morale. Non, c’est un groupement de fait.
Cela dit, en réalité, les qualifications tenant aux personnes vont bien au-delà de cette « simple » dichotomie. Une société/personne physique peut-être un commerçant, un employeur, un prestataire de service, un vendeur, un acheteur, un non-professionnel*, un professionnel, un consommateur, un opérateur économique**, une victime, un accusé, un détenu, un prévenu, etc.
*Renvoie à la qualité d’une personne morale qui n’agit pas à des fins qui entrent dans le cadre de son activité professionnelle (art. liminaire du Code de la consommation).
**L’opérateur économique est « toute personne physique ou morale, publique ou privée, ou tout groupement de personnes doté ou non de la personnalité morale, qui offre sur le marché la réalisation de travaux ou d’ouvrages, la fourniture de produits ou la prestation de services » (art. L. 1220—1 du Code de la commande publique).
C’est simplement le moyen de vous rappeler que la qualification juridique retenue dépend aussi largement du domaine juridique dans lequel vous inscrivez (chez vous : votre cours !).
Comment qualifier un problème juridique ?
Le processus pour qualifier un problème juridique est le même que ci-dessus : il s’agit de savoir quelle situation/qualité soulève un problème et de l’intégrer à la question. On vous le dit souvent, vos problèmes juridiques doivent être plus généraux et ne pas intégrer d’éléments de fait : c’est en qualifiant que vous y parviendrez.
Par exemple, plutôt que « Jules peut-il demander l’annulation de l’achat de son ordinateur ? » ; « l’acheteur peut-il agir en nullité du contrat ? » est préférable. |
La qualification juridique : remarques d’une enseignante
👩🏻🏫 Quoi de mieux pour illustrer la qualification juridique que les retours d’une enseignante en Droit qui se fait le plaisir d’intervenir à nouveau auprès de nous, pour vous : Sofia.
Comment qualifier juridiquement Madame ?
« Madame, comment on fait pour qualifier ? »
🎤 Sofia K. : « Il n’y a pas de “manière de faire”, mais des ingrédients que l’on retrouve. Il s’agit avant tout de réfléchir et vous apprendrez, lorsque vous le ferez, que c’est propre à chacun.
Bien sûr, il y a des impairs à éviter, mais vous le saurez si vous avez une bonne maîtrise du vocabulaire, apprendre vos cours doit avant tout être un moyen de comprendre où s’inscrit chaque pièce du puzzle.
Parmi les impairs, évitez « Le Parlement représente le peuple » ou « Le vendeur n’ayant pas exécuté ses obligations, le contrat sera annulé ». Ces informations ne vont pas ensemble et trahissent un manque de connaissances.
L’Assemblée nationale est la seule chambre du Parlement qui représente directement le peuple, étant la seule chambre dont les membres sont élus au suffrage universel direct (les députés).
S’il y a un problème dans l’exécution des obligations, une sanction envisageable sera la résolution ou la résiliation. Et là encore, la terminologie retenue dépendra du type de contrat. Si vous dites résiliation, en tant que correcteur, nous lisons « contrat à exécution successive », alors gare à vous si ce n’est pas le cas. Chaque mot a un sens, et ce sens s’étend à tout un univers. »
Un corrigé détaillé Madame ?
« Madame, Vous pouvez nous écrire un corrigé ? Madame, est-ce que vous allez nous envoyer un corrigé écrit ? »
🎤 Sofia K. : « C’est la question que j’aime le moins, comme si ce que je donne à l’oral ne suffit pas pour comprendre ce qui est attendu. Comme si je n’avais pas assez de travail à corriger les copies des étudiants en featuring avec ChatGPT, il faudrait, en plus que je les aide à foncer dans un mur.
Lorsque mes étudiants me demandent un corrigé rédigé, c’est surtout pour l’apprendre par cœur et le recracher à l’examen, pas pour saisir mon raisonnement et mes attentes auxquelles coller ; pas pour mieux qualifier par la suite*, simplement pour copier-coller. Or, on l’a vu, la qualification c'est le début du raisonnement.
*Je vous en assure, je corrige leurs copies, je sais ce dont je parle. La qualification juridique dans leur copie est aussi rare qu’un 20/20 en droit. Ça existe, mais c’est anecdotique. »
Est-ce qu’on perd des points si on ne qualifie pas ?
🎤 Sofia K. : « Cela va dépendre des correcteurs. À vrai dire, j’enlève des points seulement lorsque la qualification n’est pas faite dans l’introduction du commentaire d’arrêt/la fiche d’arrêt.
En cas pratique, je ne mets absolument aucun point pour le résumé des faits et n’en enlève pas s’il n’y a pas de qualification. Les étudiants vont se piéger eux-mêmes en manquant de rigueur dans la suite du développement, il serait donc dommage de les pénaliser d’emblée.
Bien que la qualification en tant que telle n’apporte pas de point de mon côté, elle en fera forcément perdre si elle n’est pas réalisée, car le raisonnement manquera de clarté, donc il sera difficile d’attribuer les points.
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