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[ENQUÊTE] 55% des étudiants ont triché pendant leurs études


Malgré la connaissance des risques et la peur des sanctions, 55% des étudiants en droit avouent avoir déjà triché. La faute à qui ? Très probablement au laxisme latent de la part des universités, causé lui-même par un manque criant de moyens. Outils de triche, ChatGPT, plagiat, matières et facultés dans lesquelles on fraude le plus, témoignages, découvrez des statistiques incroyables de la plus grande enquête jamais menée sur la triche au sein de l’Université. 💥

enquete tricherie etudiants droit
 

Sommaire

 

Cette grande enquête a été réalisée début janvier 2023 auprès d’un panel de 2 334 répondants et acteurs de la faculté de droit : étudiants, enseignants, élèves-avocats.


🔥 L'objectif ? Collecter des milliers de données afin de répondre notamment à ces questions :

  • La triche est-elle pandémique en faculté de droit ?

  • Triche-t-on le plus dans les établissements privés que dans le public ?

  • Dans quelle faculté triche-t-on le plus ?

  • Est-ce que la peur des risques encourus empêchent les étudiants de tricher ?

  • Quels sont les moyens les plus utilisés pour tricher ?

  • Quelles sont les raisons qui poussent les étudiants à tricher ?

  • Est-on incité à tricher quand on voit son voisin le faire ?

  • Quelles sont les matières où l’on triche le plus ?

  • Les étudiants se sentent-ils davantage coupable de tricher du fait d’être étudiant en droit ?

Méthodologie : la collecte a été effectuée via un formulaire en ligne de 33 questions, sur les réseaux sociaux Facebook, Instagram, Twitter des communautés Pamplemousse Magazine, Bordel de Droit et Poney du Droit et via la newsletter de Pamplemousse Magazine.

Panel des répondants :

  • 78,6% de jeunes femmes,

  • 23,7% de L3, 23,1% de L2, 26,9% en Master (principaux),

  • France - villes où l’on a répondu le plus : Paris, Bordeaux, Lyon, Toulouse.

Définition de la triche : on entend par triche le fait d'enfreindre certaines règles, certaines conventions explicites ou d'usage en affectant de les respecter (merci Larousse).


La triche pendant un examen est constitutive d’une fraude soumise à une éventuelle procédure disciplinaire et pénale.


Partant de là, quelle est l’ampleur du phénomène en fac de droit ? Eh bien, la statistique est sans appel !

Plus d’1 étudiant en droit sur 2 (55%) avoue avoir déjà triché durant ses études supérieures.
enquete triche etudes droit

10 statistiques à retenir de cette enquête :


1️⃣ 55% avouent avoir déjà triché pendant leurs études supérieures

2️⃣ C’est à la faculté de Nanterre qu’on avoue tricher le plus (66% des répondants)

3️⃣ On triche le plus dans les matières à fort coefficient

4️⃣ 30% du panel considère que reprendre la réflexion d'autrui "sans la citer” n’est pas de la triche

5️⃣ 1 étudiant sur 2 avoue tricher par peur de rater son diplôme

6️⃣ 60% des étudiants considèrent que les mesures contre la triche sont insuffisantes

7️⃣ 32% se sentent “dégoûtés” quand ils voient les autres tricher (31% sont indifférents)

8️⃣ La triche met par ailleurs 1 étudiant (tricheur ou non) sur 4 en colère

9️⃣ 6% des étudiants ont déjà fait appel à des sites payants pour faire rédiger un devoir

🔟 58% des répondants se sentent poussés à tricher en voyant les autres le faire


Dans quelle faculté triche-t-on le plus ?

Facultes droit pourcentage tricherie

🏫 C’est dans les trois universités (relevant du secteur public) suivantes que les étudiants déclarent avoir le plus triché :

  • Nanterre (66% des répondants),

  • Bordeaux (64%),

  • Lyon 3 (58%).

Suivent Montpellier (55,1%), Toulouse (54,4), la Sorbonne (53,1%) et Assas (52,7%).


Fait intéressant, les établissements dans lesquels il semble y avoir moins de triche (c’est en tout cas ce qui est déclaré) sont 3 établissements d’enseignement supérieur privé :

  • la Catho Lyon (34%),

  • la Faculté libre de Paris (27,5%),

  • la Catho de Paris (20%).

Pourquoi triche-t-on plus dans les universités publiques ?


Cela pourrait être dû à 3 hypothèses, toutes liées à des raisons financières :


Hypothèse 1️⃣ : les moyens financiers dans le public étant limités, le corps surveillant des facultés pendant les examens est très souvent limité. Laissant alors plus de libertés aux étudiants souhaitant tricher. À l’inverse, grâce aux coûts d’inscriptions plus élevés dans les écoles privées, la surveillance mise en place est plus importante : le nombre de surveillants est plus élevé et les moyens technologiques plus développés (brouilleur d’ondes par exemple) ;


Hypothèse 2️⃣ : le corps encadrant étant plus important dans les écoles privées de droit, peut-être les étudiants se sentent-il mieux préparés face aux examens et travaillent-ils mieux que dans le public et ressentent-ils moins le besoin de tricher ;


Hypothèse 3️⃣ : la peur des étudiants du privé de décevoir les parents, généralement financeurs des formations, de se voir sanctionner pour triche. En effet, les écoles privées sont réputées plus strictes sur les cas de triche afin protéger leur réputation.


« Dans mon école, ils utilisent des brouilleurs d’ondes pour éviter d’accéder à internet pendant les examens. Je ne triche pas pour différentes raisons, mais déjà, si je me faisais attraper, je serais couverte de honte vis-à-vis de mes parents » affirme Alice, passée d’abord par la faculté avant de rejoindre le privé à l’Ucly.


En quelle année triche t-on le plus ?


En licence de droit, c’est pendant la troisième année (L3) qu’on triche le plus. C’est en tous cas ce qu'a répondu notre panel d’étudiants en master (59% contre 25% à tricher en L1 et 31% en L2).


Il est aisé d’expliquer ce chiffre par la sélection en master, devenue drastique depuis la réforme entrée en vigueur en 2020. En effet, la nécessité d’avoir de très bonnes notes au 1er semestre de la L3 est essentiel pour tout étudiant espérant décrocher le master juridique de ses rêves.

 

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Les étudiants les moins bons trichent-ils le plus ?


Si vous pensiez que les étudiants les moins bons étaient ceux qui trichaient le plus, vous vous mettez probablement le stabylo dans l'œil. 🙅‍♂️


Car ce ne sont pas forcément “les pires élèves” qui trichent le plus, 67% des étudiants de notre (gros) échantillon ont déclaré se situer entre 10 et 15 de moyenne quand ils ont triché.


« La seule fois où j’ai vu quelqu’un se faire prendre, avec ses petites fiches en l’occurrence, c’était bien celle qu'on n'aurait jamais soupçonnée tricher » en rigole encore Victor. « Une dame plus âgée, vers la quarantaine, et 2e de promo ! » ajoute-t-il.


De son côté, Élise , aujourd’hui en Master 1, déclare :

« Les élèves avec des bonnes notes sont susceptibles de tricher à cause de la peur de l'échec.

C'est dur de se mettre la pression et de se dire "je veux 15 partout". Pour se rassurer, ils auront tendance à tricher alors qu'ils ont pourtant le bagage pour réussir » .


Alors est-ce qu’ils avaient réussi à être dans cette tranche parce qu’ils avaient déjà triché ? L’histoire ne le dit pas. 🤷‍♂️


Dans quelles matières triche-t-on le plus ?


📚 On a voulu savoir quelle matière faisait tomber le plus de cheveux de la tête de nos futurs praticiens du droit !

Voici les résultats :

  • 80,5% ont triché en droit administratif

  • 69,6% en droit civil

  • 69,1% en droit constitutionnel

  • 47,7% en histoire du droit

  • 44,7% en langues

  • 35,4% en droit des obligations

  • 30,3% en droit pénal

  • 28,1% en intro en droit

  • 27,9% en droit des contrats

  • 27,7% en institutions juridictionnelles/administratives

 

❤️ Le saviez-vous ?

Près d’un étudiant de la Sorbonne (établissement public) sur 4 ayant déjà triché, l'a fait au moins une fois en droit administratif. Le Conseil d’État dislikes this. À l’Ucly (établissement privé), près d’1 étudiant sur 2 a déjà triché au moins une fois en droit administratif.

 

Plus de triche dans les matières à fort coefficient


Les conclusions sont sans appel, on triche le plus dans les matières à fort coefficient. Un point dans une matière majeure pesant plus lourd dans la moyenne générale que pour une matière mineure, la pression est donc plus forte et la triche (et fraude en partiels) mécaniquement plus élevée. On a posé la question aux étudiants de master (ayant donc passé la barre de la licence) :

  • 81% en droit administratif ;

  • 70% en droit civil ;

  • 69% en droit constitutionnel ;

  • 48% en histoire du droit ;

  • 45% en langues ;

  • 35% en droit des obligations ;

  • 30% en droit pénal ;

  • 28% en introduction en droit ;

  • 28% en droit des contrats ;

  • 28% en institutions juridictionnelles/administratives.

Dans le top 5, 3 sont des matières sans Code. Est-ce qu’on tricherait plus quand il n’y pas de Code, ou bien les matières sans codes sont-elles plus compliquées à apprendre ? Difficile d’y répondre simplement.

 

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Quels outils les étudiants utilisent-ils pour tricher ?


👨‍💻 On a demandé aux tricheurs avec quels outils ils avaient fraudé pendant les partiels. Et voici le top 5 des mécanismes de triche :


1️⃣ 55 % Communiquer avec un autre candidat, copier sur quelqu’un

2️⃣ 40 % Internet et messageries

3️⃣ 23 % Antisèches papier

4️⃣ 20 % Documents non autorisés (fascicules…)

5️⃣ 7 % Conserver sur soi du matériel non autorisé


C’est la communication avec autrui qui domine ici. Parmi eux, 63% des étudiants ont déjà échangé des réponses lors d’examen, plutôt solidaires les étudiants en droit, non ? Chose intéressante : ils n’étaient pourtant que 55% à avouer avoir déjà triché dans leurs études supérieures.


Conclusion : une petite partie (8% pour être précis) d’entre eux estiment que l’échange de réponses (notamment l’aide d’un ami) n’est pour eux pas constitutive de triche.

Des systèmes de triche ingénieux


Certains bébés juristes font preuve d’ingéniosité quand il s’agit de tricher. Voici quelques exemples :


🎙 Sur Bordel de Droit (la plus grosse page Facebook de France sur les réseaux sociaux), un étudiant indique : « QCM en TD : 3 réponses par question. Je dois sauver mes potes alors on se met d’accord, je tape sur la table avec l’index pour indiquer la réponse A, avec le majeur pour indiquer la B, l’annulaire pour la C ».

🎙 « Concernant la préparation des TD, beaucoup d’étudiants sont rodés et l’on voit même au grand jour des appels à former des groupes de travail sur les réseaux sociaux » ajoute un autre.


🎙« Devant moi, une étudiante avait ses AirPods pendant les examens, elle appelait son père avocat pour obtenir de l’aide ! » rapporte également un étudiant de façon anonyme.

🎙Terminons par un témoignage ​​d’un L2 à Montpellier via Bordel de Droit : « au partiel, la prof de CM de droit admin’ donne un sujet quasiment identique à un arrêt vu et corrigé en TD. Certains se sont connectés sur l’ENT avec leur téléphone pendant l’examen pour voir la correction qui avait été donnée lors du TD. Or, les profs ont accès à toutes les connexions avec le nom et l’heure, donc ils ont pu voir exactement qui avait triché ».


Faire appel à des sites spécialisés

Enfin, et il s’agit d’une tendance qui s'est accrue ces dernières années, faire appel à des sites pour rédiger un devoir à sa place. Même si ce procédé reste marginal avec 6% des répondants, c’est quand même 18 étudiants sur un amphi de 300 !

etudiants droit payent pour devoirs

Preuve en est avec le témoignage d’un chargé de TD et professeur particulier outré de Bordeaux : « Combien de demandes de la sorte ai-je eues ! En septembre, une maman m’appelle et m'indique "je ne sais pas comment demander ça, nous sommes des gens honnêtes. On l'a fait juste une fois.

Une prof a rédigé le devoir de mon fils, un maître de conférence. Là, l'idée serait que vous passiez l'examen à sa place, comme c'est à distance, ce sont des QCM" ».

L’intelligence artificielle, le nouvel outil de triche


Les étudiants de notre panel comptent-ils utiliser ChatGPT pour réaliser leurs devoirs dans le futur ?

À cette question, près de 90% des répondants ont déclaré qu’ils ne comptaient pas utiliser l’intelligence artificielle ChatGPT pour réaliser leurs devoirs. Peut-être encore le manque de maîtrise et de connaissance de l’outil empêchent-il les étudiants de l’utiliser avec efficacité.


C’est en tous cas ce que confirme cette chargée de TD que nous avons interrogé pour nous éclairer sur les chiffres de cette enquête : « J'en ai discuté avec mes étudiants en TD et ils ne savent pas comment l'utiliser. Personnellement, j’ai peur que cet outil détruise la rigueur du raisonnement que l’on souhaite inculquer à la faculté. Cela aura des répercussions sur leur façon d’étudier et notre façon d’enseigner ».

 

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Pour autant, 1 répondant sur 4 estime tout de même que ChatGPT changera modérément ou radicalement la façon d’étudier.


Alors que près d’1 étudiant sur 2 considère qu’il doit être perçu comme un outil (49%) plutôt qu’une menace (51% ont considèrent ChtaGPT comme un menace dans le cadre des études de droit) .


« Il faut en faire un outil. ChatGPT ne peut aujourd’hui pas constituer un menace tant ses performances sont loin des attentes imposées dans les études de droit, comme celles de la rigueur et du raisonnement. Personnellement, je demande à cet outil un plan de dissertation et demande à mes étudiants ce qui ne va pas pour les faire progresser » ajoute l’enseignante.


À quel moment des études les étudiants trichent-ils ?


🗓 Pour ceux ayant répondu qu’ils avaient déjà triché, 65% ont déclaré que c’était pour préparer les TD (préparation à plusieurs, notamment).

Deux raisons qui expliquent ce chiffre :


1️⃣ Les travaux dirigés et le contrôle continu mis en place par les universités pèsent lourdement dans la moyenne ;


2️⃣ Il est très facile d’échanger et de s’entraider pour réaliser sa dissertation, son commentaire d’arrêt, son cas pratique.

 

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S’entraider pour préparer les TD, c’est tricher ?


Évidemment, la plupart feront attention à ne pas rendre une copie trop similaire de celle de leur acolyte mais les enseignants ne sont pas dupes et savent que l’entraide est de mise lors de la préparation des travaux dirigés.


Même si certains chargés de TD demandent à leurs étudiants de travailler seuls pour favoriser la progression, pour d’autres, cette entraide n’est pas forcément constitutive de triche.


C’est en tous cas la position de cette enseignante que nous avions interrogée pour la rédaction d’un autre article du site :

« Est-ce qu'on peut réellement appeler ça de la triche ? On sait que quand ils font leurs TD, ils ont accès à tout : bases de données, cours, ouvrages et moyens de communication.

Selon moi, il est donc normal de s'appuyer dessus pour les faire. Ce n'est pas réellement de la triche, c'est même la manière dont ils doivent procéder pour favoriser l'apprentissage et la mémorisation ».


Elle ajoute qu’ « échanger entre étudiants, confronter les points de vue, c’est de cette manière qu’on apprend à raisonner ».

 

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Près de 30% trichent aux semi, 50% aux examens


29% des tricheurs déclarent avoir triché pendant les galops d’essai alors qu’1 étudiant sur 2 déclare avoir triché aux examens (et 5% aux oraux).


Le stress et le poids des notes, plus élevé aux partiels (arrivant en fin de semestre) qu’aux galops d’essai, incite très probablement les étudiants à jouer leur va-tout pendant cette échéance finale constituée par les partiels.


Le cas de la triche lors des examens à distance


Suite aux confinements liés à la pandémie de la Covid-19 et la mise en place des partiels à distance, il a été de notoriété publique que les étudiants du monde entier ont su profiter du contexte pour tricher (entendez-vous, composer avec les cours ou les fiches à côté, en étant connecté avec un ou plusieurs autres étudiants via les messageries instantanées, etc...)


69% des étudiants en droit ont révélé avoir déjà triché pendant leurs examens à distance !


À leur décharge, beaucoup d’étudiants justifient ces pratiques par le cadre nébuleux des règles de composition alors mises en place. C’est ce qu’avance cet étudiant de façon anonyme. « Le prof n’avait déjà pas l’air d’être très clair avec lui-même sur ce qu’on avait le droit de faire ou pas. La vérité, c’est qu’il était aussi perdu que nous ».

C’est en effet compréhensible, le corps enseignant et administratif devait organiser des examens dans un contexte unique en son genre et sans avoir le temps d’anticiper.


Une enseignante de la team Pamplemousse nous explique d'ailleurs « On savait que les étudiants avaient accès à tous leurs outils. Pendant les examens que j'ai assurés en distanciel, ils avaient droit à tout.


Donc, pas de triche possible (normalement), mais j'en ai 5 qui ont trouvé le moyen de plagier. Même de cette manière, les résultats n'étaient pas bons. Pourquoi ? Parce que l'étudiant, au lieu de raisonner, recopie ».


« Quand il triche, il s'enfonce dans ce cercle très vicieux et n'est pas en mesure de faire évoluer son raisonnement. Mieux vaut ne pas tricher et avoir 10 que tricher pour un 13 ».

Enfin, beaucoup d’étudiants qui ne trichaient pas jusqu’ici ont pourtant triché lors des partiels à distance. Voyant leurs camarades se vanter de le faire, ceux-là se seraient alors sentis désavantagés s’ils ne trichaient pas aussi.


« Je n’avais jamais triché mais là, j’avoue que j’avais les cours à côté de l'ordinateur. Mais tout le monde le faisait, je ne voulais pas être le dindon de la farce » conclut Elise.


La perception de la triche par les étudiants


👀 La Team Pamplemousse a voulu comprendre comment était perçue la triche par les étudiants. Ces derniers sont-ils conscients que certaines pratiques sont constitutives de fraude ? Se sentent-ils coupables ? Quid de la peur des répercussions ?


Des sanctions dissuasives en cas de triche


Les sanctions en cas de fraude lors des examens/partiels


En cas de flagrant délit de fraude ou tentative de fraude aux examens ou concours, l’auteur de la fraude ou de la tentative de fraude risque deux types de sanctions :


Des sanctions administratives (visées par le décret du 13 juillet 1992)

Avertissement, blâme, exclusion de l'établissement pour une durée maximum de cinq ans, exclusion définitive de l'établissement, exclusion de tout établissement public d'enseignement supérieur pour une durée maximum de cinq ans, exclusion définitive de tout établissement public d'enseignement supérieur. Voici les sanctions auxquelles vous vous exposez en cas de tricherie.


« Le prononcé d’une sanction emporte la nullité de l’épreuve correspondante. Il revient, en outre, à la juridiction disciplinaire de décider s'il y a lieu de prononcer, à l'égard de l'intéressé, la nullité du groupe d'épreuves ou de la session d'examen ou du concours » (Décr. n°92-657 du 13 juill. 1992, art. 40).


Des sanctions pénales

Condamnation de trois ans de prison et/ou 9 000 euros d’amende (L. 23 déc. 1901 réprimant les fraudes dans les examens et concours publics, art. 2).


Il est par ailleurs possible de faire appel de la décision devant le Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche (CNESER) dans les 2 mois suivant la notification de la décision.


Les sanctions en cas de triche lors des travaux dirigés


C’est dans la réalisation des exercices de droit (dissertations, fiches de jurisprudence, commentaires d’arrêts/d'articles, ou cas pratiques) que les cas de triche surviennent le plus. Il s’agit le plus souvent de plagiat, c’est à dire d’utiliser les propos/idées d’autrui sans en créditer l’auteur.


Cette pratique du plagiat est un délit de contrefaçon (atteinte aux droits d’auteur, protégés par le Code de propriété intellectuelle) vous faisant encourir le paiement de dommages et intérêts, jusqu’à 2 ans d’emprisonnement et 150 000€ d’amende.

Une méconnaissance de la loi sur le plagiat


L’enquête révèle que 30% du panel interrogé considèrent que “reprendre l’idée/ la réflexion de quelqu’un d’autre sans pour autant la citer” n’est pas de la triche !

enquete tricherie droit

« Pourtant à la fac, c’est limite la première chose qu’on nous apprend, pas de plagiat ! » indique Nissrine, étudiante en Master 1 de droit à l’ISD.


Le plagiat est l’un des sujets qui fâchent le plus les enseignants, qui prennent pourtant la peine de rappeler en chaque début d’année que les idées appartiennent à leur auteur. Et que les reprendre sans citer la source s’identifie à du plagiat constitutif d’un délit.

« Ce chiffre est énorme ! C'est s'attribuer la paternité d'une œuvre. »

Les étudiants n'ont pas nécessairement la capacité de pousser la réflexion aussi loin que le fait la doctrine et ça se voit directement quand ça n'est pas d'eux.


Or, ça n'a pas de sens puisque l'objectif est de leur apprendre à raisonner. Sauf qu'en recopiant bêtement les idées d'autrui, on n'apprend rien. On ne progresse pas. De plus, il faut leur dire que c'est grillé à 200 km et que ça peut être lourdement sanctionné !


À titre illustratif, toute tentative de plagiat est sanctionnée par un 0 chez moi. Les étudiants sont prévenus dès le début du semestre.

On ne copie pas les idées. On les cite.

C'est tellement facile de le faire. Et c’est encore plus simple pour moi de le repérer, j’ai un bon radar » nous commente Kahina, enseignante à la faculté de Belfort, et co-auteur de l'ouvrage "Comment Hacker sa L2 Droit ?".


Des sanctions qui tombent rarement


En réalité, rares sont les sanctions du plagiat et celles-ci dépendent de différents facteurs dont le type d’établissement et le type de plagiat commis.

Au gré de la politique de l’établissement (la plupart des facultés ont une charte anti-plagiat) ou du correcteur, un plagiat pourra être sanctionné d’une mauvaise note voire d’un 0. Rares sont les mesures disciplinaires, suspensions ou expulsions, et encore moins les poursuites judiciaires.


Le plagiat baisse-t-il avec les années ?


En voyant tomber les 0/20 pour plagiat et en apprenant au fur et à mesure à raisonner, la Team Pamplemousse s’est demandée si ce chiffre baissait en passant dans les années supérieures.


Surprise là aussi, les L3 sont plus nombreux (36%) que les L1 (26%) à considérer la reprise d’une idée sans citer son auteur comme de la triche ! Les raisons potentielles ?

  • 👉Les attentes en L2 puis L3 sont plus importantes (rigueur et raisonnement, notamment) ;

  • 👉 Une certaine inaction de la part du corps enseignant face à ce problème ;

  • 👉 Une peur qui diminue au fil des ans.

« Grosso modo, si les étudiants en première année ont peur du système, en L3, ils savent qu’il est inoffensif. Aucune surprise si vous ajoutez à cela la pression de la sélection pour obtenir un master » ironise Augustin, fondateur de Pamplemousse.


« En voyant les sanctions tomber que trop rarement, les étudiants savent qu’ils ne risquent de toute façon pas grande chose ! » confirme Léo, étudiant à Nanterre.


Les étudiants connaissent-ils les risques encourus ?


Une grande majorité connaît les risques…


Et bien oui, une forte majorité (86%) affirme “connaître exactement les risques encourus” en cas de triche (de vrais juristes… enfin pas tous, apparemment !).


8% des répondants ne trouvent pas du tout ou peu dissuasive la sanction en cas de triche. Tandis que 92% la trouvent plutôt ou très dissuasive. 90% indiquent quant à eux avoir peur des risques de sanction.


Pour autant, la présente étude montre que malgré la peur des risques encourus, 78% des étudiants trichent quand même ! Une preuve de plus que le système en place aujourd’hui dans le monde universitaire est complètement inopérant.


Ces statistiques s’expliquent donc en partie par le fait que la peur de rater son diplôme est bien supérieure aux risques encourus et des potentielles répercussions en cas de triche.

« Le diplôme est aujourd’hui sacralisé et les étudiants sont prêts à tout pour l’obtenir, malgré la peur et les risques de sanction.

Aujourd’hui, l'étudiant vient consommer à la faculté comme il est consommateur en dehors. Beaucoup ont du mal à comprendre qu’ils travaillent pour produire de la réflexion afin de devenir apte à travailler pour une entreprise ou pour eux-mêmes. Ils viennent obtenir un diplôme et basta » commente Poney du Droit (1re influenceuse du droit sur Instagram), qui a coaché des milliers d’étudiants.


Conclusion : la majorité des étudiants connaissent les risques, trouvent les sanctions dissuasives, ont peur des risques de sanctions mais près de la moitié d’entre eux avouent avoir quand même triché. Preuve que les sanctions sont trop peu appliquées pour que certains étudiants ne prennent pas le risque !

14% sont dans l’ignorance


14% de personnes restent donc dans l’ignorance de l’étendue de la sanction.

Ce qui ne manque pas de faire réagir ce chargé de TD : « on ne sensibilise pas assez les étudiants aux risques encourus. Et en réalité, c'est triste à dire, mais il ne se passe rien quand quelqu'un est pris en train de tricher ».


Les étudiants en droit, coupables, en colère ?


Plus d’1 étudiant sur 2 (53%) ne se sent pas vraiment ou pas du tout coupable de tricher.

Ironie ou pas, 71% des étudiants ayant déclaré avoir triché pendant leurs études supérieures ne se sentent pas davantage coupables du fait d’être étudiant en droit ! Fait-on des études de droit pour notre sens de l’éthique et de la justice ? Probablement pas tout le monde...


32% se sentent “dégoûtés” quand ils voient les autres tricher, 31% sont indifférents.

La triche met par ailleurs 1 étudiant (tricheurs ou non) sur 4 en colère.


Les motivations poussant à la triche


Évidemment, la Team Pamplemousse a voulu en savoir plus sur les raisons qui poussent les étudiants en droit à tricher. Voici leurs réponses (ils pouvaient choisir plusieurs raisons) :

▶️ 49 % : « J’avais peur de rater mon diplôme »

▶️ 46 % : « Je n’avais pas travaillé suffisamment »

▶️ 42 % : « Matière à fort coefficient »

▶️ 33 % : « Je ne voulais pas être en désavantage par rapport aux autres que je voyais tricher »

▶️ 19 % : « Matière à faible coefficient »

▶️ 3 % : « Conserver ma bourse »


La peur de rater son diplôme


Autant les étudiants n’ont pas peur de tricher mais près d’1 sur 2 avoue tricher par peur de rater son diplôme.

etudiants droit peur rater diplome

Les raisons ? Probablement la faute à un taux de réussite faible, dès la première année couplée à une vraie appréhension de l’avenir, à une situation financière précaire (en tous cas pour certains), et à un système de notation trop subjectif et souvent jugé comme pas très juste.


Des raisons financières


Dans une étude publiée par l’UNEF, un étudiant vivant à Paris doit débourser en moyenne 1 156 euros chaque mois pour subvenir à ses besoins. Travailler à côté des études devient donc obligatoire. « Le sacrifice est tellement important que redoubler devient insupportable » commente Augustin.

Un enseignement parfois lacunaire


Un enseignant avance une autre hypothèse, l’accessibilité des études de droit. « Il existe un réel manque d'encadrement en faculté ce qui rend inaccessible un bon enseignement. J’entends des étudiants me dire que leur enseignant ne fait pas TD, ce qui laisse des étudiants mal préparés pour affronter les semi-partiels et les examens finaux ».

Évidemment, tous les chargés de TD ne manquent pas à leur devoir (on en profite pour envoyer de l’amour à tous les enseignants de la Team Pamplemousse ❤️).


Le discours de terreur des enseignants


Une étudiante de Bordeaux avance une autre raison expliquant la peur de rater son diplôme, le discours de terreur de certains enseignants. « Vous n'aurez pas de master, vous n'y arriverez jamais, vous viendrez me parler quand vous aurez mon niveau… sont des phrases qu’on entend de certains profs mal lunés ou simplement méchants ».


Peur qui génère chez les étudiants un véritable stress et une réelle souffrance mentale (79% affirmaient dans notre étude sur la santé mentale avoir subi une souffrance psychologique au cours de leurs études).


Malheureusement, la peur et la pression sociale jouent un réel rôle dans la normalisation de cette déviance.


Un système de notation injuste


Le système de notation mis en place par l’Université est aussi un facteur déclenchant la peur de rater un diplôme. Là où en médecine, par exemple, les QCM sont notés par des machines, en droit, les grilles de notation ne sont pas montrées aux étudiants et beaucoup ne comprennent souvent pas comment telle ou telle note a pu être attribuée (à soi ou son camarade).


« En quelque sorte, c’est comme si vous leur disiez que leur avenir était entre les mains du hasard. Ajoutez à cela une ambiance parfois délétère dans certaines facultés et vous avez un cocktail terrifiant pour certains étudiants ! » ajoute Augustin.


Le manque de travail


46% de l’échantillon affirment avoir triché à cause du fait de ne pas avoir travaillé suffisamment. De fait du rythme assez soutenu des études de droit, de la mauvaise organisation, d’une mauvaise formation aux techniques de travail efficaces (tout le monde n’a pas eu l’opportunité de se procurer un bon livre de méthodologie de travail), beaucoup d’étudiants accumulent du retard.


« À chaque semestre c’est la même chose, on veut bien faire et reprendre de bonnes habitudes de travail. Et au final, on est quand même en galère à quelques jours des examens » commente Sophia, étudiante en L3 Droit.


« Manque de travail ou simplement peut-être une certaine paresse de la part de certains. On a parfois le sentiment que tout leur est dû et qu'on doit tout leur offrir sur un plateau.

Mais beaucoup oublient qu’il n’y a pas de secret : on travaille pour avoir ce qu'on veut » ajoute un professeur d’une grande université francilienne.

Malheureusement, et j’en suis intimement convaincu, la vie les rattrapera toujours. Mais bon, on n'est pas là pour donner des leçons de vie » termine t-il contristé.


Pour ne pas être désavantagés


33% des étudiants ont répondu qu’ils avaient triché pour « ne pas être en désavantage par rapport aux autres qu’ils voyaient tricher. » C’est là l’un des effets pervers du système. S’il contamine des étudiants qui, de base, voulaient composer dans les règles, alors c’est qu’il y peut-être bel et bien un problème de fond.


« Regardez à votre gauche, à votre droite. L’un d’entre vous trichera pour ne pas se sentir désavantagé par rapport aux autres qu’il verra tricher » pourra-t-on peut-être entendre sur les bancs de la fac à la rentrée prochaine !


Une institution indifférente et permissive

Là aussi, cela est expliqué, en partie en tous cas, par la permissivité du corps professoral encadrant et de l’institution qui y sont parfois indifférents. C’est alors un cercle vicieux : pour ne pas être désavantagés, les étudiants préfèrent courir le risque (très relatif donc, au vu du nombre de sanctions) de tricher aussi.


Pire, c’est parfois les enseignants eux-mêmes qui laissent faire et participent parfois (involontairement ?) au système. Une étudiante explique, « Oral de droit pénal des affaires, le prof avait fait deux listes de sujets, une avec des chiffres en face des sujets, l'autre avec des lettres. Le groupe du matin postait dans notre groupe de discussion les sujets avec le chiffre ou lettre correspondants. Sauf que la liste était restreinte et que le prof nous laissait passer dans l'ordre que l’on souhaitait. Résultat : on a tous ou presque choisi nos sujets et notre ordre de passage tout l'après-midi ».


Des règles floues et non crédibles


En soi, si l’on peut éventuellement faire sortir ce dernier exemple de l’assiette de la triche (on vous laisse juger), notons que l’institution n’arrive simplement pas à mettre en place un système fiable pour que les étudiants puissent composer de manière juste et équitable, sans privilégier certains ou léser d’autres.


Les conséquences de la triche


➡️ Le constat est clair, la triche est massive et les étudiants en sont les premières victimes.


Malheureusement, c’est en effet tout une génération de juristes arrivant sur le marché du travail qui risque d’avoir perdu en crédibilité (à condition que la triche ait augmenté avec le temps) et d’être moins forts d’un point de vue technique.


Chiffre intéressant, plus de 6 étudiants sur 10 considèrent d’ailleurs que la triche dégrade la valeur du diplôme sur le marché du travail.

« On fabrique des tricheurs et des générations de juristes moins forts »

explique maître Samuel, avocate au barreau de Paris qui a bien voulu commenter cette étude pour nous. « Les étudiants sont-ils finalement coupables ou victimes du manque de moyens mis en place par les ministres qui se sont succédé à l'Enseignement ? » se demande-t-elle enfin. L'œuf ou la poule…


Et notre avocate n’a pas tort, puisque 23% de ce panel d’étudiants considérant que la triche dévalorise leur diplôme avouent eux-même avoir triché !


Sur ce dernier point, dans les facultés dites “prestigieuses” comme Assas ou la Sorbonne et qui délivreraient des diplômes plus reconnus sur le marché du travail, ce chiffre monte à 77%.


Les mesures à prendre pour enrayer le phénomène


Face à ce constat, y a-t-il des mesures à prendre pour enrayer ce phénomène favorisant la triche ?


Près de 60% des étudiants considèrent que les mesures prises par les facultés sont insuffisantes pour lutter contre la triche ! Parmi ces 60% de répondants, 87% estiment qu’il faut plus de personnel pour lutter contre la triche.

mesures contre triche insuffisantes

Fait intéressant, ce sont ceux qui trichent qui sont les plus nombreux à déclarer que les mesures de lutte contre la triche sont insuffisantes (ils ne sont que 70% vs 87%). Un appel à l’aide ?

  • Dans tous les cas, 40% environ estiment qu’il faut plus de sensibilisation sur la triche ;

  • 39% déclarent que “plus de moyens technologiques” devraient être mis en place ;

  • 30% pensent qu’on devrait être “plus sévère dans les sanctions”.

Un manque de moyens et de sanctions efficaces ?


Si les étudiants trichent autant malgré la connaissance des sanctions qu’ils trouvent dissuasives, c’est bien que personne n’a réellement peur d’être pris la main dans le sac.


La preuve en est avec cet exemple retrouvé par la Team Pamplemousse sur un forum ouvert en ligne (les fautes ont été corrigées pour éviter de vous faire saigner des yeux 👀) :


« Je viens de tricher à mon partiel de droit privé, et je me suis fait prendre le téléphone sur les genoux. Les surveillants ont rempli une feuille et on m'a dit que j'allais être convoquée. Je regrette tellement, j'ai du mal à dormir la nuit parce que je me dis que j'ai de grandes chances d'avoir fichu tout mon avenir en l'air par pure débilité. Je sais que je risque 5 ans sans possibilité de passer d'examens ».


Puis quelques heures après, la même étudiante repentie ajoute :


« Je me suis renseignée et apparemment, ils n'ont encore jamais attribué la sanction, j'espère ne pas être là première surtout que je suis en L1 ». Tout est dit, donc.


Des surveillants trop peu nombreux et sensibilisés


D’abord, en tous cas dans les universités (peut-être différemment du privé où les chiffres sont moindres, cf plus haut), les surveillants sont trop peu nombreux pour contrôler les tentatives de fraude. Quand le chat n’est pas (suffisamment) là, les souris dansent.


Ou bien trop peu formés ou sensibilisés eux aussi. « Peut-être faudrait-il, pour encadrer ces pratiques, préciser quelles sont les règles » indique Camille, une enseignante en droit public.


De quoi laisser pantois plus d’un pépin !


Quoi qu'il en soit les pépins, on ne peut que vous conseiller d'éviter la triche. Un travail efficace vous suffira ! 😉

 
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